tag:blogger.com,1999:blog-36771261291962093902024-03-20T17:29:15.592-07:00Parlez-vous chimie ?Ce blog reprend les textes de la chronique sur la nature et la communication de la chimie que j'ai tenue de 2008 à 2011 dans l'Actualité Chimique, mensuel de la Société Chimique de France.REEhttp://www.blogger.com/profile/14040627823711364864noreply@blogger.comBlogger30125tag:blogger.com,1999:blog-3677126129196209390.post-20083117680938027662011-06-27T01:19:00.000-07:002014-01-24T01:17:17.518-08:00Chimie et société : des difficultés chroniques<div style="text-align: justify;">
Entre le début de l’année 2008 et juin 2011, <span style="font-style: italic;">l’Actualité Chimique</span> a proposé une chronique sur la communication de la chimie intitulée « Parlez-vous chimie ? ». Par là, nous avons voulu
initier une réflexion profonde, impudique et sans tabous, autocritique
et volontairement dérangeante, mais toujours bienveillante, pour sortir
la chimie de l’impasse communicationnelle dans laquelle elle se trouve
depuis trop longtemps, pour rechercher des solutions hors des sentiers
devenus des autoroutes à force d’être (re)battus, et contribuer à fonder
le futur d’une chimie <span style="font-weight: bold;">en</span> société. Le présent blog retrace les contenus et les évolutions de cette chronique.<br />
<br />
Né dans une famille de chimistes, élevé entre une usine du groupe <span style="font-style: italic;">Rohm and Haas</span> et les salles de TP d’un lycée strasbourgeois, orienté vers la chimie par les Olympiades du même nom, puis vers son enseignement par l’agrégation, c’est véritablement par passion pour cette discipline que j’ai commencé à m’intéresser aux rapports qu’elle entretient avec la société. D’abord convaincu par les analyses que j’entendais mes collègues faire de ces relations, c’est pourtant à la fois ma pratique de la médiation scientifique et la fréquentation des sciences humaines et sociales qui m’ont rendu de plus en plus circonspect quant à la pertinence des arguments et des slogans tels que « tout est chimique », « on ne va tout de même pas recommencer à s’éclairer à la bougie », « il faut séparer la science de ses applications », « imaginez un monde sans chimie », « le principe de précaution est un frein au progrès », « il faut redorer le blason de la chimie », « la chimie n’a pas voix au chapitre dans les médias », et j’en passe.<br />
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Non pas que ces affirmations soient totalement dénuées de fondement ou de signification, mais il y a bien longtemps que je me suis convaincu (et je suis loin d’être le seul à l’être) que, parce que trop simplistes, elles ne constituaient pas les bonnes réponses aux problèmes relationnels qu’entretient la chimie avec la société civile, les responsables politiques, les ONG et les médias. Pourquoi ? Parce que pour comprendre ces relations, il est nécessaire de ne pas se contenter de les observer depuis « l’intérieur » de la chimie. Parce qu’il est nécessaire de comprendre non seulement la chimie, mais également la société, ses évolutions et les questions de communication.<br />
<br />
En un siècle, la chimie a contribué (peut-être plus que toute autre science) à transformer le monde dans lequel nous vivons, avec des bénéfices immenses et quelques effets secondaires regrettables. Parallèlement, la société a évolué dans ses valeurs et ses besoins, les deux évolutions se faisant parfois dans des directions contraires. Ainsi, alors que la science modifiait de plus en plus les contours de concepts porteurs de valeurs fortes tels que le corps, le vivant, la nature (une plante OGM est-elle « naturelle » ?), la société plébiscitait un « retour au naturel » après un engouement sans précédent pour les plastiques ou les intrants agricoles au milieu du siècle dernier [1].<br />
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Par ailleurs, ce sont les relations que nous entretenons désormais avec le pouvoir et les prises de décision qui évoluent, les citoyens n’accordant plus leur confiance à ses anciens représentants légitimes, comme en atteste le sondage ci-dessous (cliquer pour agrandir).<br />
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<div style="text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEixWpEfDYUkac5_escGxI_rKgkbt9bf-VlJVSB29uXCLG6p15J-meVJhFY_5FqGqjAteMnm71YWDDvvAR1uYWUoaKqPcb_T8cDBJTE2UFvP_cviMVz4Qzs_e03_xbZEqjT9hMhvGUVKA0U/s1600/Sondage+TNS-SOFRES.jpg"><img alt="" border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEixWpEfDYUkac5_escGxI_rKgkbt9bf-VlJVSB29uXCLG6p15J-meVJhFY_5FqGqjAteMnm71YWDDvvAR1uYWUoaKqPcb_T8cDBJTE2UFvP_cviMVz4Qzs_e03_xbZEqjT9hMhvGUVKA0U/s400/Sondage+TNS-SOFRES.jpg" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5622830556256978242" style="cursor: hand; cursor: pointer; display: block; height: 282px; margin: 0px auto 10px; text-align: center; width: 400px;" /></a></div>
Je ne suis bien entendu pas responsable de ces évolutions, qu’il m’arrive même souvent de déplorer lorsque j’ai l’impression que nos concitoyens se fient moins à ceux qui ont des arguments concrets et robustes à proposer qu’aux charlatans et aux idéologues. Mais je me serais senti responsable si je n’avais pas essayé de rechercher et de proposer des solutions pour adapter la communication de la chimie à ces évolutions et à ces exigences démocratiques nouvelles de nos pays occidentaux.<br />
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Ce sont ces impressions et convictions que j’ai voulu partager avec vous depuis 2008, lecteurs et lectrices de <span style="font-style: italic;">l’Actualité Chimique</span>, à travers cette chronique et ce blog. Une chronique écrite « entre nous », où ont été émises des idées parfois encore un peu incertaines, testées des pistes nouvelles, soumises à vos réflexions et vos propres pratiques. Je remercie d’ailleurs très sincèrement ceux-celles de nos lecteurs-trices qui, pendant trois ans, ont pris la peine de me faire part de leur approbation, de leurs désaccords ou de leurs critiques constructives.<br />
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L’objectif de cette chronique était de rechercher ensemble de nouvelles voies d’entente et une meilleure compréhension de la place que pourrait avoir à l’avenir la chimie dans la marche du monde ; j'espère avoir le temps à l'avenir de continuer à relever le défi et de pousuivre le débat de manière constructive.<br />
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____<br />
<span style="font-size: 85%;">[1] Meikle J.L., <span style="font-style: italic;">American Plastic. A Cultural History</span>, Rutgers University Press, New Brunswick, 1995, cité par B. Bensaude-Vincent.</span></div>
REEhttp://www.blogger.com/profile/14040627823711364864noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3677126129196209390.post-88163501381860673492011-06-26T23:58:00.000-07:002011-06-27T00:32:00.838-07:00Communication et "deficit model"<div style="text-align: justify;">En <a href="http://parlezvouschimie.blogspot.com/2010/08/la-chimie-durable-verte-et-responsable.html">juin 2010</a>, nous relations quelques données du rapport chimie-société en lien avec l’idée selon laquelle l’exigence de <span style="font-style: italic;">durabilité</span> induisait pour la chimie, au-delà des préoccupations écologiques désormais bien intégrées, un principe fondamental de <span style="font-style: italic;">responsabilité</span> économique et sociale, voire éthique. Dans la continuité de ce billet, nous montrons ce mois-ci comment il est possible, et probablement nécessaire, d’en tenir compte dans sa communication.<br /></div><div style="text-align: justify;"><br />L’affichage par les chimistes industriels de leur conscience écologique renouvelée par la mise en place de la procédure REACH, celle qui teinte tous les discours sur la <span style="font-style: italic;">chimie durable</span> et met invariablement en avant les 12 principes de la <span style="font-style: italic;">green chemistry</span>, les conduit certes à tout entreprendre pour éviter les accidents industriels, limiter l'impact environnemental de leurs procédés de production, contrôler la nocivité et la quantité de leurs effluents, produire des substances de synthèse inoffensives et prouver leur innocuité avant leur mise sur le marché, voire prévoir l'intégralité des cycles de vie des biens de consommation qu’ils produisent.<br /><br />Or il serait imprudent de croire que cette exigence s’applique uniquement aux procédés industriels. Au contraire, pour l’ensemble des acteurs de la chimie, elle doit désormais porter sur le rôle et la place accordés aux connaissances qu’elle produit et aux applications qui en découlent ; sur la manière dont elle propose à la société les options technologiques qu’elle rend possibles et, par suite, sur la manière dont elle parle d’elle-même, dont elle se présente au public ; en bref, sur sa logique de communication.<br /><br />La conséquence, trop souvent occultée par les débats stériles autour du <span style="font-style: italic;">principe de précaution</span> (à moins qu’il ne permette justement d’éviter d’aborder la véritable question de front), est aussi dérangeante au premier abord qu’incontestable après réflexion. Comment ? Il faudrait consulter la société avant de développer une nouvelle technologie alors qu’elle améliorera indéniablement son confort ? Avant même d’investir dans des recherches qui, par leur développement industriel, créeront des milliers d’emplois ? Il faudrait brider le progrès, museler la connaissance, dont la sauvegarde constitue pourtant une de nos valeurs inaliénables ?<br /><br />Inquiétudes légitimes. Mais dans une société démocratique, les citoyens ne sont-ils pas supposés choisir leur avenir ? Décider de ce qui est bon pour eux ? Préférer que l’argent public soit investi dans la lutte contre la pauvreté ou la culture plutôt que dans les nanotechnologies, quitte à perdre quelques points de PIB ? Refuser des recherches sur le vivant (biotechnologies, biologie synthétique) qui heurtent des valeurs tout aussi inaliénables ? N’y a-t-il pas un risque que les intentions des chimistes soient interprétées comme une négation de ces principes démocratiques lorsque l’une de leurs revues titre « La chimie prépare notre avenir » [i] ?<br /><br />Il semble donc qu’il y ait une convergence tout à fait opportune à explorer, en termes de responsabilités écologique, économique et sociétale, entre l’idée de chimie durable et l’abandon de modes communicationnels obsolètes et contre-productifs, liés à une vision du rapport science-société totalement erronée car reposant sur une conception simpliste : celle que les anglo-saxons nomment le <span style="font-style: italic;">deficit model</span>.<br /></div><span style="font-size:85%;"><br /></span><div style="text-align: center;"><span style="font-size:85%;"><span style="font-weight: bold;">Le deficit model en bref</span></span><br /><span style="font-size:85%;">POSTULAT : Il y a un manque de soutien pour la chimie.</span><br /><span style="font-size:85%;">DONC : Il faut organiser des campagnes d’information et de séduction.</span><br /><span style="font-size:85%;">ALORS : « Les gens » sauront, comprendront et aimeront.</span><br /><span style="font-size:85%;">ENFIN : Ils soutiendront la chimie.</span><br /></div><br /><div style="text-align: justify;">Derrière cette démarche aussi répandue que caricaturale se dissimulent deux hypothèses implicites : 1/ « Les gens » ne sont pas capables de juger par eux-mêmes (personne ne prenant en général la peine de définir qui sont ces gens) et 2/ Ils sont <span style="font-style: italic;">contre</span> parce qu’ils n’ont rien compris. Ce que résume d’une manière humoristique la figure suivante.<br /><br /></div><div style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiS0q2btESVHAhmcuGha0JTu4peqEUdLB4yo9p2COWxG6_QkNOyoxrGhR8L688xxosiqRMR3si8I-ezDvVPbywDoWsHv9HflnKoX_4xz8mtfGbblZQs0XBNS0vJVMT7B9zfHfX1CJr-ZO8/s1600/deficit.jpg"><img style="display:block; margin:0px auto 10px; text-align:center;cursor:pointer; cursor:hand;width: 320px; height: 233px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiS0q2btESVHAhmcuGha0JTu4peqEUdLB4yo9p2COWxG6_QkNOyoxrGhR8L688xxosiqRMR3si8I-ezDvVPbywDoWsHv9HflnKoX_4xz8mtfGbblZQs0XBNS0vJVMT7B9zfHfX1CJr-ZO8/s320/deficit.jpg" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5622795281937375650" border="0" /></a></div><div style="text-align: center;"><span style="line-height:115%;font-family: Calibri;mso-fareast-font-family:Calibri;mso-bidi-Times New Roman"; mso-ansi-language:FR;mso-fareast-language:EN-US;mso-bidi-language:AR-SAfont-family:";font-size:85%;" >Caricature d’une communication inspirée par le <i style="mso-bidi-font-style:normal">deficit model</i>.</span><br /></div> <style> <!-- /* Font Definitions */ @font-face {font-family:Calibri; panose-1:2 15 5 2 2 2 4 3 2 4; mso-font-charset:0; mso-generic-font-family:auto; mso-font-format:other; mso-font-pitch:variable; mso-font-signature:3 0 0 0 1 0;} /* Style Definitions */ p.MsoNormal, li.MsoNormal, div.MsoNormal {mso-style-unhide:no; mso-style-qformat:yes; mso-style-parent:""; margin-top:0cm; margin-right:0cm; margin-bottom:10.0pt; margin-left:0cm; line-height:115%; mso-pagination:widow-orphan; font-size:11.0pt; font-family:Calibri; mso-fareast-font-family:Calibri; mso-bidi-font-family:"Times New Roman"; mso-fareast-language:EN-US;} .MsoChpDefault {mso-style-type:export-only; mso-default-props:yes; font-size:10.0pt; mso-ansi-font-size:10.0pt; mso-bidi-font-size:10.0pt; font-family:Calibri; mso-ascii-font-family:Calibri; mso-fareast-font-family:Calibri; mso-hansi-font-family:Calibri;} @page WordSection1 {size:612.0pt 792.0pt; margin:70.85pt 70.85pt 70.85pt 70.85pt; mso-header-margin:36.0pt; mso-footer-margin:36.0pt; mso-paper-source:0;} div.WordSection1 {page:WordSection1;} --> </style> <span style="line-height:115%;font-family: Calibri;mso-fareast-font-family:Calibri;mso-bidi-Times New Roman"; mso-ansi-language:FR;mso-fareast-language:EN-US;mso-bidi-language:AR-SAfont-family:";font-size:10.0pt;" ></span><span style=" line-height: 115%; font-weight: normal;font-family:Calibri;font-size:10pt;" lang="EN-US" ></span><span style="line-height:115%; mso-ansi-language:EN-USfont-family:Calibri;font-size:10.0pt;" lang="EN-US" ></span><div style="mso-element:endnote-list"><div style="mso-element:endnote" id="edn1"> </div> </div><br /><div style="text-align: justify;">A cette conception naïve du public s’ajoute une erreur si compréhensible qu’elle en est excusable, pour le chimiste comme pour n’importe quel autre scientifique : celle qui consiste à transposer son cas particulier à celui de ses interlocuteurs, en imaginant qu’eux aussi vont être conquis par les merveilles de la chimie au fur et à mesure que s’accroîtront les connaissances et la conscience qu’ils en auront. Or l’opinion n’est pas qu’affaire de connaissances : elle se construit à partir d’expériences vécues, sur un système de valeurs préexistant, sur des imaginaires robustes, des aspirations, des intérêts et des peurs qu’il est malhonnête de qualifier « d’irrationnelles » pour les discréditer. De fait, de nombreuses études montrent que les populations les plus instruites ne sont pas celles qui soutiennent le plus la diffusion débridée des innovations technologiques [2]. Serait-ce parce qu’elles ne seraient pas suffisamment éduquées <span style="font-style: italic;">en</span> sciences ? Osons émettre l’hypothèse selon laquelle ce serait plutôt parce qu’elles ne sont pas éduquées <span style="font-style: italic;">seulement</span> en sciences…<br /><br />Nous y reviendrons dans un prochain billet.<br />___<br /> <style> <!-- /* Font Definitions */ @font-face {font-family:"Cambria Math"; panose-1:2 4 5 3 5 4 6 3 2 4; mso-font-charset:0; mso-generic-font-family:auto; mso-font-pitch:variable; mso-font-signature:-536870145 1107305727 0 0 415 0;} @font-face {font-family:Calibri; panose-1:2 15 5 2 2 2 4 3 2 4; mso-font-charset:0; mso-generic-font-family:auto; mso-font-format:other; mso-font-pitch:variable; mso-font-signature:3 0 0 0 1 0;} /* Style Definitions */ p.MsoNormal, li.MsoNormal, div.MsoNormal {mso-style-unhide:no; mso-style-qformat:yes; mso-style-parent:""; margin-top:0cm; margin-right:0cm; margin-bottom:10.0pt; margin-left:0cm; line-height:115%; mso-pagination:widow-orphan; font-size:11.0pt; font-family:Calibri; mso-fareast-font-family:Calibri; mso-bidi-font-family:"Times New Roman"; mso-fareast-language:EN-US;} span.MsoEndnoteReference {mso-style-noshow:yes; mso-style-parent:""; vertical-align:super;} p.MsoEndnoteText, li.MsoEndnoteText, div.MsoEndnoteText {mso-style-noshow:yes; mso-style-link:"Note de fin Car"; margin:0cm; margin-bottom:.0001pt; mso-pagination:widow-orphan; font-size:10.0pt; font-family:Calibri; mso-fareast-font-family:Calibri; mso-bidi-font-family:"Times New Roman"; mso-fareast-language:EN-US;} p {mso-style-noshow:yes; mso-style-priority:99; mso-margin-top-alt:auto; margin-right:0cm; mso-margin-bottom-alt:auto; margin-left:0cm; mso-pagination:widow-orphan; font-size:12.0pt; font-family:"Times New Roman"; mso-fareast-font-family:"Times New Roman"; mso-bidi-font-family:"Times New Roman";} span.NotedefinCar {mso-style-name:"Note de fin Car"; mso-style-noshow:yes; mso-style-unhide:no; mso-style-locked:yes; mso-style-link:"Note de fin"; mso-fareast-language:EN-US;} .MsoChpDefault {mso-style-type:export-only; mso-default-props:yes; font-size:10.0pt; mso-ansi-font-size:10.0pt; mso-bidi-font-size:10.0pt; font-family:Calibri; mso-ascii-font-family:Calibri; mso-fareast-font-family:Calibri; mso-hansi-font-family:Calibri;} @page WordSection1 {size:612.0pt 792.0pt; margin:70.85pt 70.85pt 70.85pt 70.85pt; mso-header-margin:36.0pt; mso-footer-margin:36.0pt; mso-paper-source:0;} div.WordSection1 {page:WordSection1;} --></style><span style="font-size:85%;">[1] <span style="font-style: italic;">L’Actualité Chimique</span>, N°348-349, janvier-février 2011.</span><br /><span style="font-size:85%;">[2] Lire par exemple : Bucchi, M. & Neresini, F. Biotech remains unloved by the more informed, <span style="font-style: italic;">Nature</span> 416, 261, 21 March 2002. </span></div>REEhttp://www.blogger.com/profile/14040627823711364864noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3677126129196209390.post-1974589313621605812011-01-22T16:22:00.000-08:002011-06-27T02:37:27.173-07:00Breaking Bad<div style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Depuis longtemps déjà, sur ce blog</span><span style="font-size:100%;"><a style="" href="http://www.blogger.com/post-edit.g?blogID=3677126129196209390&postID=197458931362160581#_edn1" name="_ednref1" title=""></a></span><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >, nous mettons en doute la pertinence de fonder la communication de la chimie sur la question de son image. A mainte reprise en particulier, nous avons tenté de montrer que le prosélytisme chimique ne pouvait constituer une communication responsable et crédible : nos concitoyens ont l’oreille de plus en plus affûtée pour déceler les tentatives de manipulation de leur opinion et, non seulement ils ne s’en laissent plus compter sans esprit critique, mais ils sont désormais capables de trouver seuls ce qu’on leur cache, éventuellement avec l’aide de protagonistes plus ou moins intégristes qui se retrouvent alors les seuls à parler des sujets qui fâchent.</span><br /><br /></div><div style="text-align: justify;">C’est donc aux chimistes de parler des risques industriels ou des perturbateurs endocriniens, des dangers liés à la manipulation des réactifs chimiques, de l’importance de la chimie dans l’élaboration de nouvelles drogues et produits dopants, et d’assumer ouvertement les incertitudes qui pèsent sur les éventuels usages malveillants qui pourront être faits de toutes leurs découvertes. Et peu importe que cela risque de « ternir l’image de la chimie » ; ne pas en parler risque de la ternir plus encore.<br /><br />Il reste d’ailleurs à prouver que l’évocation de ces sujets détourne réellement les jeunes de notre discipline, pour ne citer que cet aspect des enjeux de sa communication (la désaffection pour la chimie). Les deux exemples suivants viennent appuyer cette interrogation.<br /><br />Il y a quelques temps, nous assistions à une réunion de chimistes destinée à organiser des conférences expérimentales dans le cadre de l’année internationale de la chimie. Un collègue suisse y proposa une conférence qu’il considérait particulièrement importante dans la formation de ses étudiants : « L’explosion chimique maîtrisée, en situation de sécurité ». Immédiatement la proposition fut balayée : <i style="">Vous rendez-vous compte ! « Les gens » vont repartir chez eux en se disant : « Tu as vu ? La chimie, c’est quand-même dangereux… »</i>. On passa à une autre thématique, donnant l’assurance que la chimie serait présentée sous un meilleur jour.<br /><br />Oui mais… Il est bien possible que « ces gens » se seraient dit le contraire s’ils avaient pu assister à cette conférence-là : <i style="">Tu as vu ! Un bon chimiste peut manipuler des substances explosives sans danger ! C’est incroyable !</i> Gageons même qu’après avoir vu la conférence « chimiquement correcte » qui leur sera présentée à la place, certains iront jusqu’à se dire : <i style="">Tu as vu ? Ils se sont bien gardés de nous montrer des trucs dangereux… Ils savent bien qu’ils ne maîtrisent pas tous les risques…</i><br /><br />Personne ne va s’aventurer à cacher les dangers du saut en parachute. Mais on fait confiance à l’instructeur parce qu’il est extrêmement entraîné et possède des milliers de sauts à son actif. Pourquoi ne pourrait-il en être de même du chimiste ? Peut-être parce que l’instructeur de parachutisme ne semble pas avoir peur de parler de ces dangers, montrant ainsi qu’ils sont totalement sous contrôle…<br /><br />Le second exemple est plus intéressant encore. Il y a quelques mois, une série télévisée intitulée <i style="">Breaking Bad</i> est apparue sur les écrans américains. Dans la veine de <i style="">Numbers</i> (mathématiques) [i]<a style="" href="http://www.blogger.com/post-edit.g?blogID=3677126129196209390&postID=197458931362160581#_edn2" name="_ednref2" title=""></a> ou de <i style="">The Big Bang Theory</i> (physique) [iii]<a style="" href="http://www.blogger.com/post-edit.g?blogID=3677126129196209390&postID=197458931362160581#_edn3" name="_ednref3" title=""></a>, elle exploite toutes les caractéristiques d’une discipline scientifique particulière ; en l’occurrence pour <i style="">Breaking Bad</i>, la chimie. Enfin ! La chimie à l’honneur ! Une série télévisée de qualité pour elle toute seule ! Depuis le temps qu’on l’attendait !<br /><br />Las, me direz-vous… le héros est bien un chimiste brillant qui, à l’instar de Primo Levi lors de son internement à Auschwitz, utilise sa science pour tenter de sauver sa vie ; mais on est catastrophé dès le premier épisode en se rendant compte que c’est en se lançant dans la synthèse d’amphétamines ultra pures qui se vendront à prix d’or sur le marché de la drogue. Et patatras… tous nos espoirs s’effondrent. Voilà la chimie une fois encore présentée sous son plus mauvais jour, et le chimiste exposé à la vindicte populaire sous les traits d’un criminel… Que vont penser nos jeunes ?<br /></div><br /><div style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjVX9vsLymwM-9r7NpagN4dy8GaQ_j0ukuMAcXqQmHEhWRIlF5Ye14cCwsjklvnNue0GiTII5CCoAe-ifTm8OMcYxA7pCq45xPulnNBHzN5GSshNymnevrrqtqadpu1oDIcA-XYQZ8ZcAM/s1600/breakingbadwallpaper3.jpg"><img style="display: block; margin: 0px auto 10px; text-align: center; cursor: pointer; width: 320px; height: 256px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjVX9vsLymwM-9r7NpagN4dy8GaQ_j0ukuMAcXqQmHEhWRIlF5Ye14cCwsjklvnNue0GiTII5CCoAe-ifTm8OMcYxA7pCq45xPulnNBHzN5GSshNymnevrrqtqadpu1oDIcA-XYQZ8ZcAM/s320/breakingbadwallpaper3.jpg" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5568389454546572066" border="0" /></a> <span style="font-size:85%;"><span style="font-weight: bold;">Figure 1 :</span> La chimie "vraiment" sous son plus mauvais jour ?</span></div><div style="text-align: justify;"><br />C’est là qu’une fois encore, nous prenons le contrepied de ce désespoir. Et nous prétendons qu’il n’y a pas meilleur scénario pour donner envie aux jeunes de faire de la chimie. Pas de la drogue, de la chimie, oui ! Car ce que le héros de l’histoire parvient à réaliser, dans un domaine qui se trouve être celui de la drogue, est proprement extraordinaire. Qu’il soit un être humain ayant choisi une activité criminelle plutôt qu’une autre est son affaire et n’a rien à voir avec la chimie.<br />Il a d’ailleurs plutôt de bonnes raisons pour le faire et la suite des épisodes montrera en outre qu’il possède un caractère, des qualités humaines et une détermination propres à susciter l’admiration.<br /><br />Oui, il utilisera quelques cristaux de fulminate de mercure pour faire exploser l’appartement d’un trafiquant malveillant du coin. Mais à ce moment-là, qu’est-ce qu’il aimerait être chimiste, l’adolescent obligé de subir les quolibets de ses copains parce qu’il n’a pas encore appris à se défendre verbalement ! La chimie lui donne alors une impression de puissance, de perfection, de sophistication extrême. Et s’il devenait chimiste, lui aussi ? Mais pour sauver le monde, bien sûr, pas pour faire de la drogue…<br /><br />Cher lecteur assidu de ce blog et toujours pas convaincu par ce que nous y écrivons : procure-toi les épisodes des deux premières saisons de <i style="">Breaking Bad</i>, désormais disponibles en DVD en France, et prends le plaisir que nous y avons trouvé, tout en repensant à ce billet… pour ne pas te le gâcher en ruminant sur l’image de la chimie.</div><div style="text-align: justify;"> </div><div style=""><br /><hr align="left" width="33%" style="font-size:78%;"><div style="text-align: justify;"><span style="font-size:85%;">[i] <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Numb3rs">http://fr.wikipedia.org/wiki/Numb3rs</a><span style="text-decoration: underline;"><br /></span>[ii] <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/The_Big_Bang_Theory">http://fr.wikipedia.org/wiki/The_Big_Bang_Theory</a><span style="text-decoration: underline;"><br /></span>[iii] <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Breaking_Bad">http://fr.wikipedia.org/wiki/Breaking_Bad</a> Walter White, professeur de chimie dans un lycée, vit avec son fils handicapé et sa femme enceinte au Nouveau Mexique. Lorsqu’on lui diagnostique un cancer du poumon en phase terminale, tout s’effondre. Il décide alors de mettre sa famille à l’abri du besoin en montant un laboratoire de méthamphétamine avec un de ses anciens élèves devenu trafiquant.<br /></span></div><a style="" href="http://www.blogger.com/post-edit.g?blogID=3677126129196209390&postID=197458931362160581#_ednref2" name="_edn2" title=""></a></div>REEhttp://www.blogger.com/profile/14040627823711364864noreply@blogger.com3tag:blogger.com,1999:blog-3677126129196209390.post-73072961884539556682010-12-12T18:17:00.000-08:002011-06-27T01:58:40.469-07:00L'alphabet de la chimie (2/2)<div style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Dans notre <a href="http://parlezvouschimie.blogspot.com/2010/11/lalphabet-de-la-chimie-12.html">dernier billet</a>, nous dissertions sur la classification périodique, proposant que l’élément chimique soit dissocié des notions d’atome et de corps pur simple, et qu’il soit considéré davantage comme une catégorie, une classe d’objets, que comme un objet concret. Nous concluions en suggérant que ce positionnement permettait de résoudre plusieurs difficultés conceptuelles, notamment sur les plans pédagogique et communicationnel. Nous nous proposons ce mois-ci de le vérifier.</span></div><div> </div><div style="text-align: justify;"> </div><div style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Comment enseigner la structure de la matière à un enfant ou la remémorer à un adulte qui aurait tout oublié de ses leçons de chimie ? La démarche habituelle est qualifiée de « réductionniste » (le « tout » est compris comme la réunion d’entités élémentaires) : héritée de l’éclairage fourni par les travaux des physiciens au XXe siècle, elle consiste à partir de la description de la structure de l’atome, lequel est capable de se lier à ses congénères de diverses manières pour constituer les molécules, elles-mêmes constitutives de la matière visible et palpable, du moins lorsqu’elles s’y trouvent en quantité suffisante. Cette approche pédagogique <i style="">bottom-up</i> est peu remise en question, tant elle semble naturelle. Elle l’est pourtant si peu qu’on commence seulement, en ce début de XXIe siècle, à l’adopter en synthèse, dans le domaine des nanotechnologies en concevant des objets moléculaires par l’assemblage contrôlé d’atomes.</span></div><div style="text-align: justify;"> </div><div style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >En effet, s’il y a bien une manière d’appréhender la matière qui n’est pas commune au quotidien, c’est celle qui passe par la (re)connaissance de ses entités microscopiques. Dès le plus jeune âge, c’est une matière macroscopique qu’il est donné à l’enfant de rencontrer ; il s’y blottit lorsqu’elle est chaude et rassurante, apprend à s’en méfier lorsqu’il s’y heurte ou s’y brûle, l’ingère et l’excrète, comprend que celle qui le constitue s’accroît… Le rapport le plus intuitif à la matière se fait par le biais de la <i style="">substance</i>, et pas de l’<i style="">atome</i> ou de la <i style="">molécule</i>.</span></div><div style="text-align: justify;"> </div><div style="text-align: justify;"> </div><div style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >De même à ses tous premiers âges, au début de l’apprentissage du langage, l’enfant commence-t-il par percevoir des mélopées plus ou moins continues, des sons enchaînés qu’il n’apprend que peu à peu à décomposer en phonèmes, ce qui lui permettra plus tard d’entrer dans la lecture et l’écriture. Son approche du langage est elle aussi globale et « macroscopique » : il l’appréhende en y étant simplement exposé, et il ne viendrait à l’idée de personne d’apprendre à parler à son enfant en lui enseignant d’abord les lettres de l’alphabet.</span></div><div style="text-align: justify;"> </div><div style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Atomes ? Lettres ? Creusons un peu la comparaison pour voir où elle nous mène… L’atome pourrait-il être à la matière ce que la lettre est au langage ? Dans ce cas, si l’atome est une lettre pour la matière, alors l’alphabet de cette dernière ne compte pas 26 éléments, mais un peu plus d’une centaine.</span></div><div style="text-align: justify;"> </div><div style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Eléments ? La lettre de l’alphabet nommée « A » n’est pas un objet mais une catégorie, un concept qui englobe toute un ensemble d’objets tels que ceux qui sont représentés à la figure 1. Tous partagent un minimum de caractéristiques communes, dont le nombre de segments et d’intersections, qui les font reconnaître comme faisant partie de la famille des « A », mais aussi les règles qui régissent leur usage et leurs possibilités d’interaction avec les autres représentants des lettres de l’alphabet. Par extension, on nomme également ces représentants des lettres : une étape que ne franchit pas le chimiste, qui distingue, comme nous l’avons vu dans notre dernier billet (et du moins en français), l’atome et l’élément qu’il représente.</span><br /></div><p></p><div style="text-align: justify;"> </div><div style="text-align: justify;"> </div><p class="MsoNormal" style="margin-bottom: 6pt; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi0g80t4Eyb9rNjUAWovrqWrU7AWJBlv5CsVnlgoKHFOFAa-RdtZIF7wzsM9WTm4DbthVa37PPhsMwLbtEnXkVPXAB2pj7OnTmvjE4h45rt0-_9uo-p-hr45E48TZAD2O5eM0sQWz6uET4/s1600/Sans+titre-1+copier.jpg"><img style="display: block; margin: 0px auto 10px; text-align: center; cursor: pointer; width: 320px; height: 126px;" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi0g80t4Eyb9rNjUAWovrqWrU7AWJBlv5CsVnlgoKHFOFAa-RdtZIF7wzsM9WTm4DbthVa37PPhsMwLbtEnXkVPXAB2pj7OnTmvjE4h45rt0-_9uo-p-hr45E48TZAD2O5eM0sQWz6uET4/s320/Sans+titre-1+copier.jpg" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5568386070220130210" border="0" /></a></p><p class="MsoNormal" style="margin-bottom: 6pt; text-align: center;"><span style="font-size:85%;"><b style=""><span style="line-height: 115%;">Figure 1 :</span></b></span><span style="line-height: 115%;font-size:85%;" > Différentes représentations de la lettre « A ».</span></p><div style="text-align: justify;"> </div><div style="text-align: justify;"> </div><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" ><br /></span><div style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Ainsi en va-t-il également des « éléments chimiques », qui englobent tout un ensemble d’objets qui partagent un minimum de caractéristiques communes, telles que le numéro atomique et les règles qui régissent leurs interactions avec les autres atomes. Cette comparaison fait par suite de la classification périodique « l’alphabet de la chimie » et, des molécules, les mots avec lesquels s’écrit son langage. Les règles dites « de l’octet » ou « des 18 électrons » en constitue les règles orthographiques qui, comme toutes les règles, souffrent leurs petites exceptions, alors que des associations particulières d’atomes conduisent à des « fonctions chimiques » aux propriétés inédites, tout comme le « A », le « I » et le « M » s’associent pour former la terminaison du mot « faim ».</span></div><p style="text-align: justify;"></p><div> </div><div style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Les interactions supramoléculaires permettent alors de constituer les phrases avec lesquelles s’écrit le vivant, où se répètent des propositions et expressions courantes. Les liaisons hydrogène et les interactions de van der Waals en constituent la syntaxe, et les règles de la réactivité chimique les règles de grammaire : de même que le participe passé ne s’accorde pas n’importe comment avec le verbe avoir, les molécules impliquées dans une réaction électrocyclique ne s’associent pas dans n’importe quelle configuration. Et voilà Woodward et Hoffmann élevés au rang de grammairiens, à leur plus grande surprise…</span></div><p></p><div style="text-align: justify;"> </div><div style="text-align: justify;"> </div><div style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Dès lors, si les alchimistes tentaient vainement de transformer les « P » en « A », ce dont seuls sont capables les physiciens nucléaires qui ont accès au plaques d’imprimerie (ou plutôt, de nos jours, aux logiciels de définition des polices de caractères), que devient le rôle des chimistes en général ?</span></div><p></p><div style="text-align: justify;"> </div><div style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Il est indubitablement double : en premier lieu, ce sont les chimistes qui observent la matière pour ce qu’elle est et en font émerger les régularités, les comportements ; ils décryptent son langage et ses extraordinaires arrangements. Ils décrivent, définissent et classent. A ces différents égards, ils endossent la noble tâche des académiciens lorsqu’ils bâtissent les dictionnaires.</span></div><p></p><div style="text-align: justify;"> </div><div style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Mais cette compréhension leur donne surtout le pouvoir de créer du neuf, d’assembler les lettres de manières inédites, de manipuler les règles pour inventer de nouvelles phrases, ouvrir de nouveaux possibles et fournir de nouveaux espoirs. Comme le poète créé les vers qui soignent l’âme, le chimiste synthétise les molécules qui guérissent le corps. Comme l’écrivain réinvente le monde, le chimiste en fabrique de nouveaux qui changent le cours de notre existence.</span></div><p></p><div style="text-align: justify;"> </div><div style="text-align: justify;"> </div><div style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Mais lorsqu’il s’agit d’apprentissage, c’est bien par le récit que l’enfant entre dans la lecture ; c’est par le sens de l’histoire qu’on lui lit qu’il se découvre l’envie de lire lui-même, puis d’écrire. Son entrée dans le monde littéraire est macroscopique. Il nous semble fondamental qu’il en soit de même pour la chimie. Aussi, plutôt que de partir de l’atome pour « reconstruire » la matière, osons partir de la substance, introduire le concept de « pureté » par lequel il sera possible de descendre aux molécules, les <i style="">mots</i> de la matière. Dès cet instant, l’enfant n’aura qu’une envie : comprendre comment ces mots sont écrits, jouer avec leurs lettres, répéter ceux qu’il connaît, en inventer de nouveaux.</span></div><p></p>REEhttp://www.blogger.com/profile/14040627823711364864noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3677126129196209390.post-40705368369247000582010-11-15T08:13:00.000-08:002011-06-27T01:40:05.064-07:00L'alphabet de la chimie (1/2)<div style="text-align: justify;"><!--[if gte mso 9]><xml> <w:worddocument> <w:view>Normal</w:View> <w:zoom>0</w:Zoom> <w:trackmoves/> <w:trackformatting/> <w:donotshowrevisions/> <w:donotprintrevisions/> <w:donotshowinsertionsanddeletions/> <w:donotshowpropertychanges/> <w:hyphenationzone>21</w:HyphenationZone> <w:punctuationkerning/> <w:validateagainstschemas/> <w:saveifxmlinvalid>false</w:SaveIfXMLInvalid> <w:ignoremixedcontent>false</w:IgnoreMixedContent> <w:alwaysshowplaceholdertext>false</w:AlwaysShowPlaceholderText> <w:donotpromoteqf/> 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dire qu’il y a du sodium dans le chlorure de sodium ? Pour le chimiste, la réponse ne fait aucun doute : l’<i style="">élément chimique</i> caractérise le chlorure de sodium autant que le sodium métallique. Pourtant, il faut avoir une bien grande foi en ce chimiste pour admettre un tel point commun entre deux substances qui ont si peu à voir l’une avec l’autre : l’une saline, l’autre métallique, la première présente partout dans la nature, l’autre artificielle, l’une blanche et soluble dans l’eau, l’autre grise et qui décompose cette dernière…</span><br /><br /><span style="font-weight: bold;">« </span><i style="font-weight: bold;">Il y a du sodium dans le chlorure de sodium</i><span style="font-weight: bold;"> »</span></div><span style="font-size:100%;"><b style=""><span style="line-height: 115%;"></span></b></span><p></p><div style="text-align: justify;"> </div><div style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >On ressent intuitivement que la compréhension de cette proposition, qui constitue tout autant une évidence pour le chimiste qu’un mystère pour l’élève novice, nécessite de surmonter deux types de difficultés. La première provient du fait que les chimistes attribuent le même nom à la substance sodium (décrite plus haut) et à l’élément chimique sodium. Une difficulté que les enseignants s’efforcent de contourner en nommant le gaz O<sub>2</sub> « dioxygène », avec un succès limité dans la mesure où il continue à être nommé « oxygène » dans le langage courant et où, quoi qu’il en soit, le subterfuge ne résout pas le problème du sodium, du carbone ou de l’hélium.</span></div><p></p><div style="text-align: justify;"> </div><div style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >La seconde difficulté est plus intéressante encore car elle a trait à la définition même de la notion d’<i style="">élément chimique</i>. A tel point qu’il est possible de la reformuler en cette interrogation surprenante mais féconde : « <i style="">Comment faut-il définir la notion d’élément chimique pour pouvoir dire qu’il y a du sodium dans le chlorure de sodium ?</i> ».</span></div><p></p><div style="text-align: justify;"> </div><div style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >On attend de l’élève apprenti chimiste, qui n’a d’ailleurs souvent pas sollicité l’attention qu’on lui porte, qu’il parvienne après bien des efforts à appréhender et à décrire la matière selon quatre niveaux bien distincts et pourtant interconnectés : les substances et matériaux [i]<a style="" href="http://www.blogger.com/post-edit.g?blogID=3677126129196209390&postID=4070536836924700058#_edn1" name="_ednref1" title=""></a> (niveau macroscopique), les atomes et les molécules (niveau atomique [ii]<a style="" href="http://www.blogger.com/post-edit.g?blogID=3677126129196209390&postID=4070536836924700058#_edn2" name="_ednref2" title=""></a>), les représentations et les formalismes (niveau sémiologique) et enfin les cases de la classification périodique. C’est ce quatrième niveau qui reste de loin le plus difficile à appréhender, notamment dans tous les cas où il est confondu avec l’un des trois autres.</span><br /><br /><span style="font-weight: bold;">De multiples sources de confusions</span></div><span style="font-size:100%;"><b style=""><span style="line-height: 115%;"></span></b></span><p></p><div style="text-align: justify;"> </div><div style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >C’est par exemple le cas lorsque la classification périodique est représentée sous la forme d’une série de cellules contenant la photographie ou un échantillon réel du corps pur simple correspondant à chaque élément, associés à des propriétés physiques telles que densité, état physique, température d’ébullition, etc. Cette confusion entre <i style="">corps pur simple</i> et <i style="">élément chimique</i> a des conséquences particulièrement complexes chez les anglo-saxons, qui n’utilisent qu’un seul terme : « element ». La version anglaise de Wikipedia indique par exemple : « <i style="">Elemental sodium was first isolated by Humphrey Davy in 1807</i> ». Dans cette formule pourtant intraduisible en français, on devine déjà une ambigüité latente.</span></div><p></p><div style="text-align: justify;"> </div><div style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Mais celle-ci se confirme définitivement dans une autre rubrique de l’encyclopédie en ligne, qui propose alors la définition suivante : « <i style="">A chemical element is a pure chemical substance consisting of one type of atom distinguished by its atomic number, which is the number of protons in its nucleus</i> ». Il s’agit bien de la définition que nous donnons au <i style="">corps pur simple</i>.</span></div><p></p><div style="text-align: justify;"> </div><div style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Par ailleurs, des corps purs simples différents constitués du même type d’atomes pouvant vérifier la propriété ci-dessus (O<sub>2</sub> et O<sub>3</sub>, graphite, diamant et fullerènes…), on pourrait même déduire de cette définition qu’O<sub>2</sub> et O<sub>3</sub> ne relèvent pas du même élément chimique !</span></div><p></p><div style="text-align: justify;"> </div><div style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >La proposition comporte en outre un implicite énorme selon lequel des isotopes différents appartiendraient au même « type d’atomes ». Une convention bien admise par le chimiste, mais pourquoi l’élève devrait-il trouver normal que des atomes différents appartiennent au même « type » lorsqu’ils ont le même nombre de protons et non pas le même nombre de neutrons [iii]<a style="" href="http://www.blogger.com/post-edit.g?blogID=3677126129196209390&postID=4070536836924700058#_edn3" name="_ednref3" title=""></a> ?</span></div><p></p><div style="text-align: justify;"> </div><div style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >La même confusion entre <i style="">élément chimique</i> et <i style="">corps pur simple</i> risque d’être entretenue par le récit de Mendeleev remplissant sa classification grâce à ses expériences de laboratoire, ou par des ouvrages tels que <i style="">Le Système Périodique</i>, de Primo Levi, qui n’y évoque que des substances. Il n’est pas question, bien entendu, de taire pour autant ces extraordinaires histoires, mais simplement d’être conscients de l’ambigüité de ces concepts, assimilés et clarifiés tant bien que mal par les chimistes aguerris, pour prévenir la confusion qu’ils sont susceptibles d’induire chez l’élève novice.</span></div><p></p><div style="text-align: justify;"> </div><div style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Autre source de confusion, entre <i style="">élément chimique</i> et <i style="">atome</i> cette fois : la même version anglaise de <i style="">Wikipedia</i> poursuit, dans la même définition de l’élément chimique, avec la phrase suivante : « <i style="">All chemical matters consist of these elements</i> ». Les matériaux sont-ils constitués d’éléments ou d’atomes ? Nous préférons considérer qu’en tant qu’objet physiques, les matériaux doivent être décrits à l’aide d’autres objets physiques, c’est-à-dire d’atomes et non pas d’éléments (dont nous proposons plus loin de dire qu’ils n’en sont pas). La confusion semble moins fréquente en français qu’en anglais, mais il est vrai que dans les deux langues, l’élément sodium porte non seulement le même nom que la substance sodium métallique, mais également que l’objet physique microscopique que constitue l’atome de sodium.<br /><br /></span><span style="font-weight: bold;">La notion d’élément chimique</span></div><span style="font-size:100%;"><b style=""><span style="line-height: 115%;"></span></b></span><p></p><div style="text-align: justify;"> </div><div style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Comment définir alors « l’élément chimique » s’il n’est ni le corps pur simple, ni l’atome qui le constitue ? Peut-être en acceptant de s’écarter de sa conception matérialiste et de le définir non plus comme un objet, mais comme une catégorie. Une catégorie d’atomes, qui auraient en commun un seul paramètre parmi d’autres : un numéro atomique. Tous différents, les isotopes du carbone appartiennent pourtant à la même famille, au même <i style="">élément</i>, parce qu’ils possèdent tous 6 protons. Et si l’on souhaite pour commencer proposer à l’élève une définition moins abstraite, plus phénoménologique, on pourra peut-être simplement lui dire qu'un élément chimique est une famille d'atomes interchangeables sans modifications structurelles ou fonctionnelles majeures dans une molécule.</span></div><p></p><div style="text-align: justify;"> </div><div style="text-align: justify;"> </div><div style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Considérer l’élément chimique comme une catégorie et non plus comme un objet résout beaucoup de questions philosophiques, sémantiques et, par suite, pédagogiques. En particulier, dans ce dernier domaine, parce que cela ouvre la voie à une comparaison particulièrement éclairante : celle qui relie la structure de la matière et celle du langage écrit. Un exercice auquel nous nous livrerons dans notre prochain billet.</span></div><p></p><div style="text-align: justify;"> </div><div style="text-align: justify;"> </div><hr style="margin-left: 0px; margin-right: 0px;font-size:78%;" width="33%"><div style="text-align: justify;"><span style="font-size:85%;">[i] Merci à Lydie Valade pour la précision suivante : Les scientifiques du génie des procédés décrivent un matériau comme l'association nécessaire de 3 composantes : matière, propriété physique et fonction (carbone graphite, noir et de faible dureté, mines de crayon). Une matière douée de propriétés ne devient donc un matériau que lorsqu'elle est intégrée dans un objet.</span><br /><span style="font-size:85%;">[ii] Voire « subatomique » dans leurs cours de physique et, plus tard encore, « mésoscopique », voire « nanoscopique ».</span><br /><span style="font-size:85%;">[iii] Et qu’on n’aille pas croire qu’il suffise de lui dire que ce qui importe au chimiste, c’est le nombre d’éléctrons, qui se trouve être le même que le nombre de protons : la chimie travaille essentiellement avec des ions et des nombres d’oxydation où justement, ce n’est pas vrai !</span><br /></div>REEhttp://www.blogger.com/profile/14040627823711364864noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3677126129196209390.post-12233831232974170282010-10-25T07:47:00.000-07:002011-06-27T01:45:28.180-07:00Eléments de philosophie de la chimie<div style="text-align: justify; font-family:arial;"><span style="font-size:100%;">Le 11 septembre dernier, à l’<i>Ecole nationale supérieure des techniques avancées </i>(Paris), un laboratoire de l’Ecole Polytechnique, le CREA (<i>Centre de recherche en épistémologie appliquée </i>[i]) organisait une journée d’étude intitulée « <i>Epistémologie de la chimie : synthèse et perspectives</i> » [ii]. Cette rencontre internationale réunissait des chimistes philosophes et des philosophes chimistes, dont le point commun semblait être une passion partagée pour l’analyse des soubassements, des pratiques et des implications philosophiques de la chimie comme science et, depuis quelque temps, comme technoscience. L’objectif affiché de ce workshop : « <i>Identifier les bases possibles pour fonder une épistémologie de la chimie</i> ».</span><br /></div><p style="text-align: justify; font-family:arial;" class="MsoNormal"><span style="font-size:100%;"><span style="font-family:arial;">Nous y étions présents, pour notre part, convaincus qu’il ne peut y avoir de bonne </span><i style="font-family: arial;">communication</i><span style="font-family:arial;"> de la chimie sans bonne </span><i style="font-family: arial;">compréhension</i> de la chimie : « de l’intérieur » bien sûr à travers ses pratiques et les connaissances qu’elle produit, mais également « de l’extérieur » par l’analyse de ses aspects non seulement épistémologiques et philosophiques, mais également historiques, sociologiques et didactiques. </span></p><div style="text-align: justify; font-family:arial;"><span style="font-family:arial;font-size:100%;">L’intérêt des philosophes pour la chimie, et des chimistes pour la philosophie, n’est pas nouveau. Les pratiques de transformation de la matière captivèrent même davantage l’attention des philosophes au XXVIIIe siècle qu’au XXe, Diderot allant jusqu’à la considérer comme le modèle d’une philosophie expérimentale [iii]. Le chimiste Emile Meyerson (1859-1933), redécouvert récemment en France [iv], incarne à l’inverse « <i>[ces] savants [… qui] viennent à la philosophie, désireux de scruter les principes ou de critiquer les valeurs de leurs propres recherches</i> » (Andal, 1959) [v].</span><br /></div><p style="text-align: justify; font-family:arial;" class="MsoNormal"><span style="font-size:100%;">Pourtant la philosophie de la chimie, en tant que discipline académique, est récente. En atteste la parution d’un ouvrage de synthèse paru en 2005 sous le titre : « Philosophy of Chemistry: Synthesis of a New Discipline » [vi], alors que l’<i>International Society for the Philosophy of Chemistry</i> [vii] n’a qu’une vingtaine d’années d’existence. Et si la francophonie compte quelques philosophes de la chimie, tels Bernadette Bensaude-Vincent ou Isabelle Stengers, les deux seules revues à comité de lecture de ce domaine sont américaine et allemande :</span></p><p style="text-align: justify; font-family:arial;" class="MsoNormal"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >- </span><span style="font-size:100%;"><i><span style="line-height: 115%;">Foundations of Chemistry</span></i></span><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >, un journal d’histoire et de philosophie de la chimie traitant également de questions d’éducation, publié par <i>Springer</i> et dirigé par Eric Scerri.</span></p><p style="text-align: justify; font-family:arial;" class="MsoNormal"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >- </span><span style="font-size:100%;"><i><span style="line-height: 115%;">Hyle: International Journal for Philosophy of Chemistry</span></i></span><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >, journal associé à l’<i>Université de Karlsruhe</i> et dirigé par Joaquin Schummer.</span></p><div style="text-align: justify; font-family:arial;"><span style="font-size:100%;">Nous anticipons les interrogations de certains lecteurs chimistes : « A quoi une <i>philosophie de la chimie</i> peut-elle bien servir ? En quoi peut-elle être utile à la pratique de laboratoire ? Ces philosophes connaissent-ils bien ce dont ils parlent ? ». Mais surtout : « Quels sont leurs véritables objets d’étude ? ». Nous tentons ici quelques éclairages…</span><br /></div><p style="text-align: justify; font-family:arial;" class="MsoNormal"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >- </span><span style="font-size:100%;"><i><span style="line-height: 115%;">La nature de la chimie.</span></i></span><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" > C’est une des questions les plus intéressantes pour le chimiste : qu’est-ce que la chimie ? Les tentatives pour la définir sont nombreuses et rarement satisfaisantes ; pour certains, c’est l’étude des substances, pour d’autres, celles des réactions. L’étude de la structure, des propriétés et des transformations de la matière pour les uns, l’étude des réarrangements atomiques pour les autres ; si la première définition semble englober une partie de la biologie et de la physique, la seconde est circulaire puisqu’elle s’appuie sur ses propres concepts pour se définir. Or les philosophes possèdent des outils qui permettent de préciser ce que les chimistes font vraiment lorsqu’ils font de la chimie.</span></p><div style="text-align: justify; font-family:arial;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >- </span><span style="font-size:100%;"><i><span style="line-height: 115%;">Chimie et nature.</span></i></span><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" > Comment la chimie fait-elle bouger la frontière entre le naturel et le synthétique ? Entre le vivant et le non vivant ? Comment modifie-t-elle par suite notre perception de la nature ? Nos valeurs morales ? Quelles sont les différences entre une molécule synthétisée dans un réacteur d’usine et celle, de même formule, présente dans les constituants d’un arbre ? Que désigne l’adjectif « chimique » ? Y a-t-il diverses manières de l’être ? Une substance peut-elle être chimique et naturelle à la fois ? Plusieurs de nos billets ont déjà porté sur ces questions.</span><br /></div><p style="text-align: justify; font-family:arial;" class="MsoNormal"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >- </span><span style="font-size:100%;"><i><span style="line-height: 115%;">La chimie est-elle réductible à la physique quantique ?</span></i></span><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" > Une littérature fournie explore ce sujet en analysant les pratiques et la manière dont les chimistes construisent leurs théories, en lien avec les connaissances issues de la physique. Une question qui, comme celle de savoir si la biologie est réductible à la chimie, se résout partiellement en considérant la chimie est mieux caractérisée par ses pratiques et ses objectifs que par ses fondements épistémologiques.</span></p><div style="text-align: justify; font-family:arial;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >- </span><span style="font-size:100%;"><i><span style="line-height: 115%;">La réalité des concepts de la chimie.</span></i></span><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" > La chimie manipule des concepts abstraits pour décrire des entités invisibles, voire inaccessibles : elle pose donc aux philosophes la lancinante question de leur réalité (en dépit de leur opérationnalité). Qu’est-ce qu’un état de transition ? Une structure de résonnance ? L’aromaticité ? La molécule représente la plus petite entité représentative d’une substance, mais n’importe quel chimiste sait bien que les propriétés de ladite substance disparaissent dès que l’échantillon est réduit à moins d’une centaine de molécules… L’énergie même nécessaire pour rompre un dimère de molécules d’eau n’est pas très éloignée de celle qui permet de casser la liaison O-H. Des notions philosophiques, telle l’idée d’<i>affordance</i>, permettent de résoudre certaines de ces difficultés conceptuelles.</span><br /></div><p style="text-align: justify; font-family:arial;" class="MsoNormal"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >- </span><span style="font-size:100%;"><i><span style="line-height: 115%;">La chimie comme discipline paradigmatique de la science de laboratoire.</span></i></span><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" > La chimie est une science de laboratoire car les objets qu’elle étudie sont des objets créés ou rapportés au laboratoire. A cet égard, elle a développée une méthode expérimentale qui, pour les philosophes des sciences, constitue un bon modèle comparatif pour les autres sciences. Longtemps seule discipline à « créer son objet », selon les célèbres mots de Marcelin Berthelot, elle est désormais rejointe par la biologie synthétique et par les nanotechnologies ; la compréhension de ce rapport particulier de la chimie à son objet permet d’éclairer ceux qu’entretiennent ces nouvelles pratiques avec les leurs.</span></p><div style="text-align: justify; font-family:arial;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >- </span><span style="font-size:100%;"><i><span style="line-height: 115%;">Quelles sont les fondations philosophiques de la classification périodique ?</span></i></span><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" > Quelle est la réelle nature de ce que représentent les cases de ce tableau et dans quelle mesure peut-on dire qu’il y a du sodium dans le chlorure de sodium ? Autrement dit : comment faut-il définir la notion d’élément chimique pour pouvoir dire qu’il existe du sodium dans le chlorure de sodium ? Quels liens y a-t-il entre la représentation de la classification et ses significations (figure 1) [viii] ?</span><br /></div><div style="font-family: arial;"> </div><br /><p class="MsoNormal" style="text-align: center; font-family: georgia;" align="center"><!--[if !mso]> <style> v\:* {behavior:url(#default#VML);} o\:* {behavior:url(#default#VML);} w\:* {behavior:url(#default#VML);} .shape {behavior:url(#default#VML);} </style> <![endif]--><!--[if gte mso 9]><xml> <w:worddocument> <w:view>Normal</w:View> <w:zoom>0</w:Zoom> <w:trackmoves/> <w:trackformatting/> <w:donotshowrevisions/> <w:donotprintrevisions/> <w:donotshowinsertionsanddeletions/> <w:donotshowpropertychanges/> <w:hyphenationzone>21</w:HyphenationZone> <w:punctuationkerning/> <w:validateagainstschemas/> <w:saveifxmlinvalid>false</w:SaveIfXMLInvalid> <w:ignoremixedcontent>false</w:IgnoreMixedContent> <w:alwaysshowplaceholdertext>false</w:AlwaysShowPlaceholderText> <w:donotpromoteqf/> <w:lidthemeother>FR</w:LidThemeOther> 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Un article d’Eric Scerri dont nous conseillons par ailleurs la lecture donnait en 2000 une vision simple et claire des enjeux de cette discipline, sous le titre : <i>Philosophy of Chemistry – A New Interdisciplinary Field ? </i>[viii]</span><br /><span style=";font-size:100%;" ></span><p class="MsoNormal" style="text-align: justify;"><span style="font-size:100%;">Dans notre prochain billet, nous nous intéresserons plus particulièrement à la définition de la notion d’élément chimique, dont la compréhension pose des problèmes particulièrement complexes en termes de communication.</span><br /></p><br /><hr style="height: 3px;font-size:78%;" align="left" width="33%"><span style=";font-size:85%;" >[i] <a href="http://www.crea.polytechnique.fr/">www.crea.polytechnique.fr</a><br /></span><p style=";font-size:small;"><span style="font-size:85%;">[ii] <a href="http://www.crea.polytechnique.fr/LeCREA/ateliers.htm">www.crea.polytechnique.fr/LeCREA/ateliers.htm</a></span></p><span style=";font-size:85%;" >[iii] Pépin, F. (2010) </span><span style="font-style: italic;font-size:85%;" >Diderot : la chimie comme modèle d’une philosophie expérimentale</span><span style=";font-size:85%;" >, La Découverte.<br /></span><p style=";font-size:small;"><span style="font-size:85%;">[iv] Telkes-Klein, E. (2007) </span><span style="font-style: italic;font-size:85%;" >Émile Meyerson, de la chimie à la philosophie des sciences</span><span style="font-size:85%;">, Bulletin du Centre de recherche français de Jérusalem, 18, mis en ligne le 07/01/08, consulté le 20/09/10. <a href="http://bcrfj.revues.org/index112.html">http://bcrfj.revues.org/index112.html</a></span></p><span style=";font-size:85%;" >[v] Andal, A. (1959) </span><span style="font-style: italic;font-size:85%;" >Gaston Milhaud (1858-1918)</span><span style=";font-size:85%;" >, Revue d’histoire des sciences, XII, pp. 96-110.<br /></span><p style=";font-size:small;"><span style="font-size:85%;">[vi] Baird, D. Scerri, E. McIntyre, L. (2005) </span><span style="font-style: italic;font-size:85%;" >Philosophy of Chemistry: Synthesis of a New Discipline</span><span style="font-size:85%;"> (Boston Studies in the Philosophy of Science), Springer.</span></p><span style=";font-size:85%;" >[vii] <a href="http://ispc.sas.upenn.edu/">http://ispc.sas.upenn.edu/</a><br /></span><p style=";font-size:100%;"><span style="font-size:85%;">[viii] Journal of Chemical Education : <a href="http://tinyurl.com/34xa89s">http://tinyurl.com/34xa89s</a></span></p>REEhttp://www.blogger.com/profile/14040627823711364864noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3677126129196209390.post-26039648396748061912010-08-20T05:48:00.000-07:002010-08-20T05:57:53.182-07:00Lancement du manifeste Révoluscience<div style="text-align: justify; color: rgb(0, 0, 0);">Dans notre dernier billet, nous proposions quelques pistes pour rendre durable la communication de la chimie en même temps que la chimie elle-même. Or voici que durant l’été, une entreprise ambitieuse a été montée sous la forme d’un « manifeste pour une médiation scientifique autocritique et responsable » par un collectif d’associations de l’Ecole normale supérieure : le collectif <span style="font-style: italic;">Ré</span><span style="font-style: italic;">voluscience </span>porté par le groupe <a href="http://www.groupe-traces.eu/">Traces</a>, rassemblant les <a href="http://www.atomes-crochus.org/">Atomes Crochus </a>et <a href="http://www.paris-montagne.org/">Paris Montagne</a>.<br /><br />La communication publique de la chimie, et de la science en général, n’est pas neutre. En participant à construire une image de la science auprès du public, ainsi qu’une image du public auprès des scientifiques, elle a un impact majeur sur les relations entre science et société, et sur la manière dont la science elle-même est pratiquée.<br /><br />C’est pourquoi il est indispensable de remettre en permanence en discussion les principes qui fondent la communication et la médiation scientifiques : comprendre les implications des principes adoptés et des discours portés, pour pouvoir ensuite choisir… voilà l’objectif du manifeste porté par le collectif <span style="font-style: italic;">Révoluscience</span>. Car aujourd’hui plus que jamais, c’est à la société toute entière de choisir l’avenir qu’elle souhaite, et aux médiateurs scientifiques de nourrir ces choix pour qu’ils soient les plus conscients possible.<br /><span style="font-size:85%;"><br /></span><span style="font-style: italic; color: rgb(51, 51, 51);font-size:85%;" >Qu’est-ce qu’une médiation scientifique responsable ?</span><span style="font-size:85%;"><br /></span><span style="color: rgb(51, 51, 51);font-size:85%;" >• La science participe à la construction de la paix, mais aussi à l’alimentation des guerres. Une médiation scientifique responsable a le pouvoir de peser dans la balance. Et elle a également le devoir de se donner ce pouvoir.</span><span style="font-size:85%;"><br /></span><span style="color: rgb(51, 51, 51);font-size:85%;" >• La science peut contribuer à réfuter des superstitions néfastes, mais aussi à écraser des mythes enrichissants. Une médiation scientifique responsable doit toujours savoir quand elle renforce chacun de ces impacts.</span><span style="font-size:85%;"><br /></span><span style="color: rgb(51, 51, 51);font-size:85%;" >• La science recherche la vérité, l’argent, le pouvoir, le savoir, le partage, les brevets, la peur, la poésie. Elle aide à mieux soigner, mais aussi à mieux tuer ; à mieux voir, mais aussi à mieux fermer les yeux. Le collectif </span><span style="font-style: italic; color: rgb(51, 51, 51);font-size:85%;" >Révoluscience </span><span style="color: rgb(51, 51, 51);font-size:85%;" >appelle par suite une médiation scientifique qui sache reconnaître les risques de la science, et promouvoir ce qu’elle a de meilleur.</span><br /><br />La nécessité d’une telle entreprise se justifie-t-elle ? Qu’il nous suffise de citer un exemple, observé lors d’une des dernières éditions de la <span style="font-style: italic;">Fête de la science</span>. Imaginez la grande mezzanine de la <span style="font-style: italic;">Cité des Sciences</span> ; face à la verrière, un public nombreux est massé sur un gradin pour assister à une conférence de gastronomie moléculaire. Le conférencier, jeune maître de conférences d’une université parisienne [i], commence…<br /><br />Et il commence en s’attaquant bille en tête aux tours de mains culinaires des spectateurs. « Vous, madame, vous tournez votre mayonnaise en huit ? Affligeant… Vous, monsieur, vous cuisez vos œufs dans l’eau bouillante ? Inutile… Et en plus vous salez votre steak avant de le cuire ? Ahurissant… La Science, mesdames et messieurs, et plus précisément la mienne, va vous faire oublier toutes ces superstitions et vous apprendre à cuisiner. »<br /><br />Un discours du 19e siècle, une science arrogante, condescendante ; qui ne respecte ni le public, ni la valeur que l’on peut attribuer à ces petits gestes qui, parce qu’ils obligent le cuisinier à accorder de l’attention à sa recette, cristallisant ainsi son application et lui permettant d’imaginer le plaisir prochain de ses proches, font qu’en effet le repas sera meilleur.<br /><br />Car si les connaissances de la science sont utiles dans bien des cas (saler le steak avant de le cuire lui fait par exemple perdre son jus par osmose), il serait très préjudiciable de calquer sur elle toutes nos conduites. Mettre son nez sous la queue d’un melon est probablement stupide ; mais cela m’aide à choisir parmi la centaine qui m’est proposée. Si je n’ai pas la chance de pouvoir m’adresser au maraîcher qui lui, saura exactement quel melon je dois acheter, cette non-connaissance, que d’aucun appelleront superstition, me fera gagner quelques minutes de ma journée, et un peu de sérénité.<br /><br />Ce manifeste n’est en aucun cas une apologie du non-savoir. Au contraire, ceux qui le portent sont scientifiques de formation et/ou de métier et chérissent la science, ses méthodes et sa vision du monde. Mais ils souhaitent avant tout une science qui sache se présenter avec humilité, dans l’écoute des valeurs de nos concitoyens et non dans le dénigrement de leurs croyances.<br /><br /><span style="font-style: italic; color: rgb(51, 51, 51);font-size:85%;" >Quelques propositions issues du manifeste Révoluscience</span><span style="font-size:85%;"><br /></span><span style="color: rgb(51, 51, 51);font-size:85%;" >• Pour une médiation scientifique qui propose, sans l’imposer, une vision scientifique du réel laissant la place à d’autres rapports au monde.</span><span style="font-size:85%;"><br /></span><span style="color: rgb(51, 51, 51);font-size:85%;" >• Pour une médiation scientifique qui présente une science qui explicite plutôt qu’une science qui dévoile, qui donne à penser plutôt qu’à croire.</span><span style="font-size:85%;"><br /></span><span style="color: rgb(51, 51, 51);font-size:85%;" >• Pour une médiation scientifique qui ne présente pas la science comme nécessaire facteur de progrès.</span><span style="font-size:85%;"><br /></span><span style="color: rgb(51, 51, 51);font-size:85%;" >• Pour des pratiques innovantes qui favorisent le débat d’idées et la clarification des valeurs en vue de soutenir les citoyens dans l’élaboration de leurs prises de positions, tant individuelles que collectives.</span><span style="font-size:85%;"><br /></span><span style="color: rgb(51, 51, 51);font-size:85%;" >• Pour une médiation scientifique qui développe des pratiques valorisant la démarche de recherche comme attitude citoyenne et démocratique.</span><span style="font-size:85%;"><br /></span><span style="color: rgb(51, 51, 51);font-size:85%;" >• Pour le développement explicite d’une déontologie de la médiation scientifique, se méfiant notamment du risque de manipulation de l’opinion que lui confère la puissance explicative des sciences.</span><br /><br />Pour en savoir plus et soutenir le manifeste, rendez-vous sur <a href="http://www.revoluscience.eu/">www.revoluscience.eu</a> ! Un blog permet de commenter chaque proposition et les textes explicatifs qui les accompagnent, paragraphe par paragraphe.<br /><br />_________________________<br /><br /><span style="font-size:85%;">[i] Cet exemple ne constitue en aucun cas une attaque ou une critique de la légitimité de la gastronomie moléculaire, que certains savent au contraire présenter clairement et avec amour, sans insulter leur auditoire.</span><br /><br /></div>REEhttp://www.blogger.com/profile/14040627823711364864noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3677126129196209390.post-46594761005409365192010-06-20T05:25:00.000-07:002010-08-20T05:48:24.202-07:00La chimie durable : verte et responsable<div style="text-align: justify;">Dans notre billet du mois de janvier 2010, nous évoquions l’idée d’une culture scientifique, technique et industrielle qui respecte les individus, leurs connaissances et leurs valeurs. D’un autre côté, l’avènement du concept de <span style="font-style: italic;">chimie durable</span> nous offre justement l’occasion de nous demander si les évolutions des procédés de la chimie vers plus de <span style="font-style: italic;">durabilité </span>ne pourraient pas également impliquer une évolution de ses rapports avec la société et, en particulier, des processus relatifs à sa communication.<br /><br />Les trois piliers du développement durable nous rappellent en effet que l’idée de <span style="font-style: italic;">durabilité </span>ne se limite pas à construire une post-modernité consciente de l’impact des activités des humains sur leurs environnements proches et sur les grands cycles naturels, mais qu’elle cherche également à y intégrer localement et globalement l’ensemble des problématiques sociales et économiques auxquelles l’humanité est confrontée. Elle induit donc, pour la chimie en particulier et au-delà des préoccupations écologiques désormais bien intégrées, un principe fondamental de <span style="font-style: italic;">responsabilité </span>économique et sociale, voire éthique.<br /><br />N’y aurait-il pas par suite une convergence opportune à explorer entre culture scientifique et chimie durable autour de cette idée de responsabilité ? De fait, l’objectif de notre billet consistera à tenter de montrer ce mois-ci que l'évolution de la chimie actuelle vers une chimie <span style="font-style: italic;">durable</span> devra nécessairement passer par une évolution des représentations que se font les chimistes de leur discipline, de la société et de la meilleure manière de gérer les interrelations qu’elles entretiennent ; c’est-à-dire, entre autre, par une évolution de leurs modes de communication.<br /><br />Car comme nous allons le voir, communiquer sur une chimie <span style="font-style: italic;">durable </span>(à la fois <span style="font-style: italic;">verte </span>et <span style="font-style: italic;">responsable</span>, donc), sur une chimie <span style="font-weight: bold;">en</span> société telle que nous l’appelons tous de nos vœux, nécessitera de passer d'une attitude défensive, positiviste et, il faut bien l’admettre, un peu condescendante parfois, à une démarche plus ouverte d'écoute et de respect des inquiétudes, des intérêts et des attentes de nos concitoyens, notamment à travers la compréhension des valeurs et des imaginaires qui les sous-tendent.<br /><br />Or l'essentiel des actions de communication des chimistes étant conditionné par l'objectif prioritaire que constitue l'amélioration de l'<span style="font-style: italic;">image publique</span> de leur discipline, l'adoption d'une telle posture semble pour le moment inaccessible à notre communauté. Pour remédier à ce problème, nous devrons en effet et au préalable parvenir collectivement à comprendre et à admettre plusieurs données du rapport nature-chimie-industrie-société qui, à défaut d’être nouvelles, sont désormais incontournables :<br /><br /> 1. Que la relation de la chimie à la société s'articule autour de deux pôles fondamentaux, le corps et la nature, qui concentrent des valeurs fortes et de puissants imaginaires, et dont les progrès de la chimie (parmi d’autres sciences) perturbent en permanence les contours.<br /><br /> 2. Que par suite, la communication de la chimie ne peut plus se limiter à une simple question d'éducation et d'instruction, pas plus qu'elle ne peut se satisfaire d'actions de promotion des bienfaits de ses innovations, mais qu'elle devra tôt ou tard s'inscrire dans des processus de discussion et de clarification des valeurs face aux démonstrations et aux faits proposés par la communauté scientifique.<br /><br /> 3. Que toute innovation issue de la recherche fondamentale, fut-elle imaginée pour améliorer la santé ou le confort des individus, influe avec un impact variable mais souvent fort sur leurs destinées et que, à cet égard, elle est susceptible de ne pas correspondre au projet de société de nombre d’entre eux [i].<br /><br /> 4. Que l'histoire du XXe siècle a notamment montré que la confiance absolue conférée aux scientifiques avait pu dans certains cas s’avérer plus néfastes que bénéfiques, soit parce que leurs inventions avaient fait l'objet d'usages pervers (à leur corps défendant ou avec leur accord), soit parce qu'elles avaient simplement eu des effets secondaires néfastes imprévisibles et donc inattendus [ii].<br /><br /> 5. Que dans le cadre d’une chimie mondialisée, il est légitime que les individus craignent les débordements d’une techno-science soumise aux lois du marché, cette crainte dut-elle se manifester par la revendication maladroite du <span style="font-style: italic;">principe de précaution</span>.<br /><br /> 6. Que la responsabilité des chimistes ne consiste donc plus seulement en leur capacité à éviter les accidents industriels, à limiter l'impact de leurs procédés de production, à contrôler la nocivité et la quantité de leurs effluents, à produire des substances de synthèse inoffensives, ni même à prouver leur innocuité ou à prévoir l'intégralité du cycle de vie des biens de consommation ; autant d’obligations qu’ils ne seront d’ailleurs jamais en mesure de satisfaire totalement [iii].<br /><br /> 7. Que dans une société échaudée par nombre d’événements dramatiques et, somme toute, moins en attente d’innovations compte tenu du niveau de confort auquel la science et la technologie lui ont permis d’accéder, les citoyens ne toléreront plus une communication de la chimie destinée simplement à justifier des choix technologiques imposés d’en haut, sans que leur voix n’ait pu être entendue.<br /><br /> 8. Que par suite, l’exercice de la démocratie impose que la chimie de demain soit une chimie <span style="font-style: italic;">choisie </span>par la société, en fonction des implications sociales (bénéfiques ou non) qu’elle présentera, soumise au crible des valeurs, des imaginaires et de l’appréciation du plus grand nombre.<br /><br /> 9. Enfin, qu’un des nouveau rôles de la communication de cette chimie nouvelle – mais pourra-t-on encore parler de « communication » ? – sera donc probablement de permettre l’expression des valeurs, des opinions et des imaginaires, et d’élargir l’arène du débat public jusqu’à la conception même des programmes de recherche, à toutes les étapes de la conception des applications technologiques qui nous seront <span style="font-style: italic;">proposées </span>(et non plus <span style="font-style: italic;">imposées</span>) après-demain.<br /><br />Pour ce faire, il serait donc probablement pertinent d’intégrer à la construction du concept de <span style="font-style: italic;">chimie durable</span>, qui semble devoir servir de ferment au développement de l’idée d’une chimie du futur, une réflexion sur la posture de la chimie à l’égard de son rapport au corps et à la nature. Et plus pertinent encore, de faire accompagner cette réflexion par des programmes de formation spécifiques, destinés à ceux-là même qui la financeront, la feront, l’autoriseront et la communiqueront demain.<br /><br />A cet égard, on ne peut que se réjouir de l’incorporation progressive, dans des masters de sciences expérimentales, de modules de plus en plus nombreux autour de la communication des sciences et de ce que l’on nomme plus généralement les <span style="font-style: italic;">science studies</span>.<br /><br />______________________________<br /><br />[i] Michel Callon parle alors de groupes concernés. Callon, M. Plaidoyer en faveur du réchauffement des relations entre science et société - De l'importance des groupes concernés, <span style="font-style: italic;">L’actualité Chimique</span>, Numéro Spécial Médiation de la chimie, nov-déc. 2004.<br />[ii] Pour une discussion de ce point délicat, voir Pestre, D. <span style="font-style: italic;">Séminaire Koyré du 11 avril 2010</span>, non publié, disponible auprès de l’auteur de cette chronique.<br />[iii] Ibid.<br /><br /></div>REEhttp://www.blogger.com/profile/14040627823711364864noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3677126129196209390.post-81309874398329183742010-04-16T08:31:00.000-07:002010-08-20T05:27:23.915-07:00Faut-il craindre ceux qui craignent la chimie ?<div style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Dans un entretien publié dans le <span style="font-style: italic;">Monde </span>du 6 mars 2010 [i], le docteur Laurent Chevallier, praticien au CHU de Montpellier et président de la commission alimentation du <span style="font-style: italic;">Réseau environnement santé</span> (RES), rend responsables de nouvelles pathologies les produits employés dans l'agriculture et les additifs alimentaires. L’occasion pour lui de promouvoir son dernier ouvrage [ii].<br /><br />Avant d’aborder l’analyse de l’entretien, commençons par signaler que ce dernier point a son importance. Car sans nier les préoccupations du public à l’égard des choix technoscientifiques qui construisent le monde dans lequel nous vivrons demain, il nous semble nécessaire de dédramatiser certains propos extrêmes en gardant à l’esprit qu’une certaine forme d’idéologie antiscience primaire sert aussi des intérêts personnels et financiers immédiats. Un constat tout aussi valable dans des cas qui contrarient au contraire les environnementalistes, comme celui de la question climatique et de ses auteurs climatosceptiques opportunistes.<br /><br />Mais revenons au propos du docteur Chevallier. L’entretien, dégoulinant de démagogie et ponctué d’explications médico-scientifiques approximatives, surfe avec brio sur la peur du cancer, le développement de l’obésité, l’omniprésence des substances de synthèse dans l’alimentation, les intérêts des industriels ou la fausse impuissance des pouvoirs publics : « <span style="font-style: italic;">On tente de nous imposer un "ordre" chimique avec des substances qui créent des désordres physiologiques dans notre corps. Ce sont les produits chimiques employés dans l'agriculture, des additifs alimentaires (colorants, conservateurs, etc.) aux effets imparfaitement maîtrisés.</span> ».<br /><br />Faute d’éléments constructifs nouveaux et percutants pour défendre une approche nutritionniste somme toute parfaitement banale (la nature de l’alimentation influe sur la santé), l’auteur s’en remet donc aux bonnes vieilles ficelles des « aliments industriels cancérigènes » et autres « perturbateurs endocriniens », allant jusqu’à évoquer leur rôle dans l’hyperactivité des enfants, pour finir sur la fameuse et énigmatique MCS (<span style="font-style: italic;">Multiple Chemical Sensitivity</span>) [iii] : « <span style="font-style: italic;">Douze pour cent de la population en serait atteinte aux Etats-Unis, mais on a encore peu d'éléments sur ces troubles. Certaines orientations nutritionnelles semblent pouvoir aider (apport en antioxydants alimentaires, prudence avec le glutamate...). Pour l'instant on est dans le domaine empirique.</span> ».<br /><br />Ce faisant, nul doute qu’il rencontre les préoccupations (néanmoins légitimes) de nombreux lecteurs potentiels, voire qu’il renforce leurs convictions du haut d’un statut professionnel crédible et grâce à un discours plutôt technique et en apparence très documenté. Et c’est ce qui nous amène à la question qui nous intéresse ici : quel impact ce type de discours crédible, publié dans un journal sérieux et totalement « anti-chimie » peut-il avoir sur l’opinion de ses lecteurs, non pas en matière de diététique mais à l’égard de l’image globale de la chimie ? Et dans quelle mesure faut-il par suite s’en inquiéter ?<br /><br />Une manière d’y répondre consiste à analyser le contenu des commentaires que les abonnés du <span style="font-style: italic;">Monde </span>ont déposé sur le site du journal dans les jours qui ont suivi la parution de l’article [iv]. En trois jours, 29 commentaires furent postés, ce qui indique à la fois un fort intérêt pour le sujet et un besoin pour les lecteurs de compléter l’analyse fournie par l’entretien [v].<br /><br />Mais à votre avis, s’agissait-il pour eux de renforcer son propos ou de le modérer ? Les paris sont ouverts… Et la réponse est fournie par le tableau ci-dessous, qui montre la répartition des commentaires, pour la plupart déposés indépendamment les uns des autres, selon quatre attitudes distinctes à l’égard du propos du docteur Chevallier.<br /><br /><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Surenchère : 7</span><br /><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Accord : 5</span><br /><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Doute : 4</span><br /><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Opposition : 8</span><br /><br /><span style="font-weight: bold;">Total des « anti-chimie » : 12</span><br /><span style="font-weight: bold;">Total des « pro-chimie » : 12</span><br /><br />Intégralité des commentaires : cliquez <a href="http://lumiere.ens.fr/traces/Commentaires.pdf">ici</a>. 5 commentaires sont hors-sujet et inclassables dans ce tableau.<br /><br />Cette répartition correspond-elle à celle que vous auriez spontanément prévue ? Si oui, vous avez une bonne perception de la perception de la chimie dans notre société et confiance en la capacité de nos concitoyens (ou au moins des abonnés du <span style="font-style: italic;">Monde</span>) à distinguer un discours militant d’une information scientifiquement fondée. Si non, peut-être commencerez-vous, vous aussi et dès aujourd’hui, à questionner les idées reçues qui circulent dans notre communauté sur la soi-disant « mauvaise image de la chimie » et qui, malheureusement, déterminent souvent ses actions de communication.<br /><br />Florilège…<br /><br /><span style="font-family:verdana;"><span style="font-size:85%;">ebolavir - 06.03.10 | 00h37<br />Amusant de penser que la génération qui prend sa retraite en ce moment, et qui est gravement menacée de finir centenaire, a vécu sa jeunesse dans un environnement chimique bien plus agressif que l'actuel, quand on mettait des antibiotiques à dose médicamenteuse dans la nourriture des animaux, quand les traitements phytosanitaires étaient excessifs, les plastiques toxiques très courants, l'alimentation industrielle pleine d'additifs à haute dose. On est devenus fragiles, ou on mesure mieux ?<br /><br />Sirius - 06.03.10 | 08h52<br />L'obscurantisme aurait il pignon sur rue dans le corps médical ? [...] Peut-on soutenir sans rougir que "dans le temps c'était mieux" en matière alimentaire ? On est face à un théorème de Boris Vian énoncé dans "En avant la Zizique" : dans le temps les vieux cons étaient jeunes et pour eux c'était mieux !<br /><br />Un"noir" - 05.03.10 | 22h24<br />J'ai sagement et patiemment lu ce texte, sans en tirer quoi que ce soit : la dernière phrase en forme de conclusion est explicite : "Pour l'instant on est dans le domaine empirique". Au moins, le signataire a le mérite de nous dire qu'il sait, qu'il ne sait pas ! […]</span><br /></span><br />A l’aube de l’<span style="font-style: italic;">Année Internationale de la Chimie</span>, pourquoi alors ne pas commencer à penser des actions de communication plus à l’écoute des peurs et des valeurs de ceux que nous voulons convaincre des bienfaits de la chimie, en gardant confiance dans leur capacité à décider de ce qui est bien pour eux ? A imaginer des actions participatives pour, nous-mêmes, mieux comprendre les évolutions de la société actuelle et construire avec elle la place que la chimie y occupera demain ? C’est à promouvoir une telle attitude que s’emploie ce blog mois après mois depuis sa création.<br /></span></div>______________<br /><span style="font-size:85%;"><br /></span><div style="text-align: justify;"><span style="font-size:85%;">[i] <a href="http://tinyurl.com/18r">http://tinyurl.com/18r</a>, article en archive payante.</span><br /><span style="font-size:85%;">[ii] <span style="font-style: italic;">Mes ordonnances alimentaires. Comment vous soigner par une bonne alimentation.</span> Les liens qui libèrent, février 2010.</span><br /><span style="font-size:85%;">[iii] Nous n’entendons en aucun cas, en critiquant le contenu de cet entretien, signifier que ces questions sont illégitimes et sans importance, ni qu’elles ne doivent pas faire l’objet des études et des réglementations les plus approfondies. Compte tenu des enjeux sanitaires et économiques qu’elles revêtent, nous considérons simplement qu’elles méritent des traitements moins naïfs et moins démagogiques.</span><br /><span style="font-size:85%;">[iv] Nous passerons ici sur les limites de l’étude, liées à la nature du public considéré ou à l’unicité du cas analysé. Il ne s’agit pas d’un article de recherche mais d’une observation ponctuelle susceptible de fournir quelques pistes en matière d’impact des discours anti-chimie sur l’image globale de la discipline.</span><br /><span style="font-size:85%;">[v] A titre de comparaison, l’article du <span style="font-style: italic;">Monde </span>relatant l’appel des 400 climatologues à la Ministre de la Recherche ne suscita que 13 commentaires début avril 2010.</span><br /></div><span style="font-size:85%;"><br /></span><span style="font-size:78%;"><a href="http://lumiere.ens.fr/traces/Commentaires.pdf">Commentaires.pdf</a></span>REEhttp://www.blogger.com/profile/14040627823711364864noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3677126129196209390.post-70148896440754633652010-03-20T07:46:00.000-07:002010-08-20T07:09:13.020-07:00L'EDD pour un bon usage de la science ?<div style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Dans notre précédent billet, nous décrivions deux réseaux majeurs contribuant à l’éducation populaire et à la sensibilisation aux sciences et à l’environnement : l’AST (<span style="font-style: italic;">Animation Scientifique et Technique</span>) et l’ERE (<span style="font-style: italic;">Education Relative à l’Environnement</span>). Evoquant les rôles respectifs que la chimie pouvait prétendre y jouer, nous suggérions qu’elle pouvait à la fois servir leur rapprochement et bénéficier de cette place privilégiée pour se montrer plus responsable. Réexaminons les schémas que nous proposions alors.<br /><div style="text-align: justify;"><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/dd-771462.jpg"><br /></a><div style="text-align: center;"><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/dd-732814.jpg"><img style="cursor: pointer; width: 194px; height: 200px;" src="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/dd-732809.jpg" alt="" border="0" /></a><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/progres-755685.jpg"><span style="color: rgb(255, 255, 255); font-weight: bold;">------------</span><img style="cursor: pointer; width: 199px; height: 200px;" src="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/progres-755678.jpg" alt="" border="0" /></a> </div><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" ><br /></span><div style="text-align: center;"><span style="line-height: 115%;font-size:85%;" ><span style="font-style: italic;">Schémas fondateurs de l’ERE et de l’AST.</span></span><br /><br /><div style="text-align: justify;">Côté ERE-DD, les intersections bilatérales des disques conduisent à différents types de développement mais aucun des trois disques ne mentionne la science et la technologie, alors que le nœud des problèmes environnementaux est souvent lié à ces dernières. Il est par suite impossible d’y faire figurer les deux courants extrêmes que nous identifiions alors : ceux des <span style="font-style: italic;">alternatifs alarmistes</span> et des <span style="font-style: italic;">optimistes progressistes</span>.<br /></div><div style="text-align: justify;">Côté AST-progrès, le schéma directeur est un peu différent : la science et la technique disent aux industriels et aux responsables politiques ce qu'il est <span style="font-style: italic;">possible </span>de faire. Le marché dit, quant à lui, ce qui est <span style="font-style: italic;">souhaité</span>, ce qui est attendu. Pendant très longtemps, le dialogue s'est déroulé exclusivement entre ces deux composantes mais, fort heureusement, ces vingt dernières années est apparu un troisième acteur : la société, qui s’exprime sur ce qu'il lui semble <span style="font-style: italic;">acceptable </span>de réaliser. Pourtant, là non plus, le rapport à la Nature n’apparaît pas, alors que la science prétend en expliciter les lois et que la technologie l’influence et la modifie constamment. Les deux courants extrêmes de l’AST, ceux des <span style="font-style: italic;">positivistes scientistes</span> et des <span style="font-style: italic;">relativistes prudents</span>, n’y sont donc pas plus visibles que ceux de l’ERE.<br />La solution est pourtant évidente : c’est conjointement que les schémas doivent être lus. Sur la délicate question du rapport nature-science-société, elles se complètent pour conduire à une représentation qui tient cette fois compte de tous les aspects et nous montre comment, de manière très schématique, AST et ERE communiquent à travers leurs rapports à l’économie et la société, et directement entre science et nature.<br /></div><br /><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/deux-795904.jpg"><img style="display: block; margin: 0px auto 10px; text-align: center; cursor: pointer; width: 320px; height: 206px;" src="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/deux-795898.jpg" alt="" border="0" /></a><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" ><span style="font-size:85%;"><span style="font-style: italic;">Le rapprochement de l’ERE et de l’AST.</span></span><br /><br /></span><div style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >En matière d’éducation scientifique et de sensibilisation au développement durable, serait-il alors possible de penser des actions inscrites à la fois dans une ASTRE (<span style="font-style: italic;">Animation scientifique et technique relative à l’environnement</span>) et une EREST (<span style="font-style: italic;">Education relative à l’environnement pour un bon usage de la science et de la technologie</span>) ? C’est ce dont pourrait bien bénéficier le champ scientifique complexe de la chimie.</span><br /></div><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" ><br /><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/quatre-700675.jpg"><img style="display: block; margin: 0px auto 10px; text-align: center; cursor: pointer; width: 200px; height: 198px;" src="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/quatre-700622.jpg" alt="" border="0" /></a><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" ><span style="font-size:85%;"><span style="font-style: italic;">La fusion des deux schémas : vers une EREST et une ASTRE.</span></span></span><br /></span></div><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" ><br /><span style="font-style: italic; font-weight: bold;">L’exemple de la chimie…</span><span style="font-style: italic;"><span style="font-weight: bold;"><br /></span></span>Si les chimistes ont bien compris l’intérêt d’appliquer leurs connaissances au traitement des questions environnementales, découvrant intuitivement l’intérêt de l’ASTRE, le concept d’EREST est plus difficile à faire accepter. Adapter une attitude plus responsable dans la communication de la chimie en favorisant son autocritique et sa désacralisation ne semble en effet pas exprimé par leurs gènes ; à cette idée, ils auraient même plutôt tendance à exprimer leur gêne…<br />Ce rapprochement que nous appelons de nos vœux n’est certes pas facile à aménager. La chimie est une discipline ancienne qui s’est de tous temps avérée fondamentale, de sorte qu’elle a gagné une véritable dimension patrimoniale. Sa communauté est structurée, concernée et corporatiste. A la fois discipline scientifique et industrie lourde, elle a subi des changements conceptuels majeurs au XXe siècle, accompagnés de bouleversements économiques liés à la structure de son industrie. Forcée à s’adapter aux évolutions de la demande sociétale, elle a su aménager ou accepter des évolutions salutaires telles que la chimie verte, la chimie durable, la procédure REACH… Pourtant, de multiples problèmes subsistent au niveau de l’ensemble des quatre pôles mis en correspondance dans la figure précédente :<br /></span><ul><li><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Très appliquée, très liée à l’économie, elle trouve sa concrétisation dans la mise sur le marché de produits nouveaux, ce qui lui permet mal de s’en démarquer, de s’en autonomiser.</span></li><li><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Son rapport à la nature est extrêmement fort et, sans jeu de mot, il est ainsi presque dans sa nature de s’y opposer, de la copier, de la supplanter, de se l’approprier même ; ce qui n’est pas sans heurter nombre de valeurs actuelles fortes et prégnantes.</span></li><li><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Son rapport à la société est compliqué : développant la nostalgie d’un âge d’or où elle constituait une discipline scientifique reine, elle a des difficultés à admettre les accidents et les dérives, se focalisant plus sur son image que sur le dialogue avec la société. De fortes contradictions structurelles (telles que l’application de la procédure REACH face au développement de l’expérimentation animale qu’elle nécessite en retour) ne facilitent pas cette prise de recul et l’empêchent d’intégrer la question des valeurs dans les activités de médiation, comme le montre la très mauvaise réception qu’eut l’<span style="font-style: italic;">Appel de Paris</span> auprès des chimistes.</span></li><li><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Sur le plan éthique, enfin, la chimie constitue une discipline tellement multipolaire, regroupant une telle multitude d’acteurs aux activités et aux intérêts si différents, qu’il est difficile d’apporter des réponses concrètes communes aux enjeux de société qu’elle soulève.</span></li></ul><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Par suite, et l’observation le confirme, on est encore loin en ce domaine de l’application de l’EREST évoquée plus haut, même si des efforts manifestes accompagnés de résultats encourageants commencent à poindre dans les milieux de la culture scientifique et technique.<br /><br /><span style="font-weight: bold; font-style: italic;">L’exemple des Atomes Crochus</span><br />Association fondée en 2002 par trois universitaires spécialisés en chimie et en sciences de l’éducation, <span style="font-style: italic;">Les Atomes Crochus</span> ont commencé à développer des actions d’ERE et d’AST indépendamment les unes des autres. La promotion du DD et la sensibilisation à l’environnement d’une part, était assurée par des ateliers pour enfants, des contes et des conférences. La promotion de la culture scientifique et technique, d’autre part, était mise en œuvre à travers des activités originales telles que les clowns de science, les conférences expérimentales interactives ou les défis d’expériences contre-intuitives.<br /><br /></span><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/atomes-767965.jpg"><img style="float: left; margin: 0pt 10px 10px 0pt; cursor: pointer; width: 320px; height: 260px;" src="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/atomes-767901.jpg" alt="" border="0" /></a><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Puis, progressivement, les deux démarches commencèrent à s’interpénétrer. Le volet ERE fut peu à peu nourri par les approches scientifiques des problématiques du DD avec des conférences du type : « <span style="font-style: italic;">Est-ce que lorsque je respire, je pollue ?</span> ». A l’inverse, des questions jusque là traitées selon des approches scientifiques exclusives nécessitèrent le recours à des outils empruntés à l’ERE : « <span style="font-style: italic;">Peut-on vraiment comparer les impacts environnementaux des déchets nucléaires et du CO2 ?</span> » ou « <span style="font-style: italic;">Les arguments scientifiques ne sont-ils pas bien souvent incomplets s’ils ne sont pas mis en regard avec l’expression des valeurs ou des représentations ?</span> ».<br /><br />Des projets naquirent alors peu à peu à l’interface entre les deux volets de l’association. Avec les ateliers-débats « <span style="font-style: italic;">Au-delà des étoiles</span> », « <span style="font-style: italic;">Frankenstein</span> » et </span><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >« Qui veut la peau des animaux ? »</span><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >, avec l’exposition photographique « <span style="font-style: italic;">Recréer la vie ?</span> » ou les concours d’écriture de contes scientifiques sur le développement durable, les connaissances scientifiques se mêlent à la discussion des enjeux politico-économiques du développement de la technologie, à la clarification des valeurs, laïques ou religieuses, et aux réflexions éthiques sur le rapport au vivant de la recherche scientifique et des brevets. Aussi est-il désormais difficile de dire auquel des deux réseaux l’association appartient. Aux deux probablement, alors que l’objectif ne réside plus dans un strict apport de connaissances scientifiques ou environnementales. Ce dernier devient un simple besoin dans le cadre d’activités de réflexion plus larges, plus participatives.<br />Une évolution des pratiques est donc possible ; ce mouvement est tout juste entamé et les bases d’une EREST et d’une ASTRE, brièvement posées dans cet article, méritent toutefois d’être consolidées. Du haut de son histoire et de son impact sur le monde actuel, la chimie y aurait sans aucun doute un immense rôle à jouer.<br /></span></div></span></div>REEhttp://www.blogger.com/profile/14040627823711364864noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3677126129196209390.post-59990964071335031092010-02-10T06:27:00.000-08:002010-04-16T08:04:57.005-07:00De l'animation scientifique à l'éducation au DD<div style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Les 10 et 11 septembre 2009, l’IUT de Tours organisait pour la première fois une rencontre entre deux communautés éducatives informelles importantes : les réseaux dits de l’AST (<span style="font-style: italic;">Animation Scientifique et Technique</span>) et de l’ERE (<span style="font-style: italic;">Education Relative à l’Environnement</span>), qui regroupent à eux deux la majorité des structures et associations de culture scientifique et de sensibilisation à l’environnement pour un développement durable (on parle d’ailleurs souvent d’<span style="font-style: italic;">Education au Développement Durable</span> (EDD)). Ces rencontres RASTERE furent ainsi l’occasion d’examiner les structures, évolutions, influences et antagonismes réciproques de ces deux réseaux. Or la chimie relève à la fois de l’AST et des préoccupations de l’ERE. En quoi peut-elle profiter de l’interaction entre ces deux réseaux, voire en retour contribuer à la constitution d’une approche communicationnelle unifiée ?</span></div><p style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" ><span style="font-style: italic; font-weight: bold;"><br />L’éducation relative à l’environnement</span><span style="font-style: italic;"><span style="font-weight: bold;"><br /></span></span></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" ><span style="font-style: italic;"><span style="font-weight: bold;"></span></span>Bien qu’elle véhicule de nombreuses connaissances scientifiques et requière des analyses systémiques approfondies, l’ERE tire beaucoup de ses motivations de l’expression de valeurs et d’idéologies portées et exprimées par des courants écologistes plus ou moins modérés : courants environnementalistes durs (mouvements pour la cause animale et antivivisectionnistes), anti-technologistes (nucléaire, OGM, nanotechnologies), décroissants et altermondialistes, naturalistes… Ces courants sont illustrés par des avatars aussi variés que les villes et maisons bioclimatiques (ou biocompatibles), le commerce équitable, les énergies et la chimie vertes, la <span style="font-style: italic;">deep ecology</span>, l’écologie industrielle ou l’agriculture écologiquement intensive.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >En dépit de cette diversité, on observe depuis une vingtaine d’années une forme de regroupement autour de l’idée fédératrice de <span style="font-style: italic;">développement durable</span>, par rapport auquel (ou par lequel) il est possible, pour chacun de ces courants, de se définir. Certes sa formulation est souvent contestée, comme l’attestent les interminables et fréquentes discussions sur la pertinence des notions de <span style="font-style: italic;">durabilité </span>et de <span style="font-style: italic;">développement </span>mais, plutôt que comme une mise en cause du concept, ce phénomène peut également être interprété comme étant le signe de la diversité des sensibilités, et donc des traductions de l’idée de DD.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >On observe également, il est vrai, l’apparition d’un certain flou accompagnant la démocratisation de ce concept, sa mauvaise compréhension, voire son accommodation (le <span style="font-style: italic;">greenwashing </span>en constituant l’élément emblématique). Malgré tout, le DD articule un peu toutes les sensibilités car tous ces courants se positionnent plus ou moins sur les trois disques de la traditionnelle figure employée pour le décrire.<br /><br /></span><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/dd-737016.jpg"><img style="float: left; margin: 0pt 10px 10px 0pt; cursor: pointer; width: 194px; height: 200px;" src="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/dd-737010.jpg" alt="" border="0" /></a></p><br /><br /><br /><br /><br /><p style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" ><span style="font-size:85%;"><span style="font-style: italic;">L’ERE : vers un développement vivable, équitable, viable… durable. On y rajoute parfois une dimension éthique, absente du schéma originel, et souvent deux flèches : celles du temps et de l’espace.</span></span><br /></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" ><br /></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Mais ils s’y positionnent souvent dans des perspectives opposées, dont les variantes extrêmes relèvent soit du ralentissement (<span style="font-style: italic;">décroissance</span>), soit de la fuite en avant (<span style="font-style: italic;">technological fix</span>). Cette distinction simple permet par suite de distinguer deux groupes différents, positionnés de part et d’autre du DD : les <span style="font-style: italic;">alternatifs alarmistes</span> et les <span style="font-style: italic;">optimistes progressistes</span>. Grâce à elle, on comprend que c’est le rapport à la science et à la technologie qui joue un rôle important dans le positionnement interne des acteurs de l’ERE.<br /><br /></span></p><div style="text-align: center;"><span style="font-size:85%;"><span style="font-style: italic;">alternatifs alarmistes<span style="font-weight: bold; color: rgb(255, 255, 255);">---------------</span></span><span style="font-weight: bold;">DD</span></span><span style="color: rgb(255, 255, 255);font-size:85%;" ><span style="font-style: italic;"><span style="font-weight: bold;">---------------</span></span></span><span style="font-size:85%;"><span style="font-style: italic;">optimistes progressistes</span></span><br /></div><div style="text-align: center;"><span style="line-height: 115%; font-weight: bold;font-size:100%;" > -----------------------------------------------------------------------------></span><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" ><span style="font-size:85%;"><span style="font-style: italic;"><br /><br />Deux courants de l’ERE distingués par leur rapport à la science et à la technologie.</span></span></span><br /></div><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" ><span style="font-weight: bold; font-style: italic;"><br />L’animation scientifique et technique</span><span style="font-style: italic;"><span style="font-weight: bold;"><br /></span></span></span><p style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" ><span style="font-style: italic;"><span style="font-weight: bold;"></span></span>Cette diversité est moins intuitive pour l’AST qui se rassemble autour de l’idée relativement consensuelle de l’importance de la diffusion de connaissances objectives dans une optique d’éducation et de promotion de la science, en dépit de la diversité des objectifs affichés (former le citoyen, lutter contre la désaffection pour les filières scientifiques, partager des passions...). En son sein, les distinctions s’opèrent donc davantage selon des courants d’ordre pédagogique et tous ses acteurs adhèrent peu ou prou à l’idée d’une science et d’une technologie qui soient intégralement dédiées au progrès humain.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Depuis quelques temps pourtant, des divergences naissent ; on commence à interroger ces moyens et objectifs. On se dit que pour traiter de la question des OGM, il est autant (voire plus) utile de clarifier ses valeurs que de comprendre ce que c’est qu’un gène ; on commence à se demander quels types de connaissances sont utiles au citoyen, si l’indicateur d’éducation scientifique doit vraiment être le pourcentage de gens qui savent qui, de la Terre, de la Lune et du Soleil, tourne autour de qui ou, de la balle de tennis et de la boule de pétanque, laquelle tombe le plus vite. Et pourquoi il faut former des scientifiques alors que tant de docteurs cherchent du travail. La dimension éthique devient plus prégnante dans les recherches, et les médiateurs scientifiques eux-mêmes posent les questions du rapport au vivant qu’elles induisent. Des scientifiques, enfin, prennent des positions politiques sur un certain usage de la science et de la technologie, comme c’est le cas du climat (Jean Jouzel), des OGM (Pierre-Henry Gouyon) ou des substances de synthèse (André Picot).<br /><br /></span><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/progres-773883.jpg"><img style="float: left; margin: 0pt 10px 10px 0pt; cursor: pointer; width: 199px; height: 200px;" src="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/progres-773877.jpg" alt="" border="0" /></a></p><p style="text-align: justify;"><br /></p><p style="text-align: justify;"><br /></p><p style="text-align: justify;"><br /></p><p style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" ><br /></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" ><span style="font-size:85%;"><span style="font-style: italic;">L’AST : la recherche du « progrès » humain.</span><span style="font-style: italic;"> Selon l’idée que l’on se fait du progrès, la dimension éthique y est incluse ou doit y être ajoutée.</span></span></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" ><br /></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Or il est aisé de constater que ces interrogations proviennent d’un recul sur la science et le progrès, qui les replace dans une vision globale et systémique du monde, selon un processus similaire à celui qui fit émerger l’idée de développement durable il y a deux décennies... Car en effet, au sein de la communauté scientifique, deux conceptions radicalement opposées du progrès se font jour : les uns, tenants d’une vision purement épistémique, considèrent la science comme séparée de ses applications, qui relèveraient exclusivement du politique. Pour eux, en tant que quête de la connaissance, la science est pure et noble ; par suite, ce qui peut être découvert ne doit pas être entravé, et ce qui a besoin d’être découvert le sera un jour. Cela les conduit à défendre des positions technoscientifiques parfois ultralibérales telles que la recherche sur la séquestration du carbone ou le refroidissement de l’atmosphère.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Les autres ont compris que la production des connaissances scientifiques était entrée dans un régime différent : celui des intrications entre connaissance, économie, politique et média. Un régime qualifié de « post académique » par certains sociologues des sciences, où la science n’est pas distincte des intérêts économiques et humains ; où elle sert autant l’armée que les hôpitaux et que toute découverte est porteuse d’autant de risques que d’espoirs, pour l’homme comme pour la biosphère. Des scientifiques prêts à accepter les moratoires et le contrôle éthique de leurs recherches...</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Cette nouvelle distinction permet de distinguer deux nouveaux groupes au sein de l’AST, positionnés de part et d’autre de la notion de progrès : les <span style="font-style: italic;">positivistes scientistes</span> et les <span style="font-style: italic;">relativistes prudents</span>. C’est donc cette fois le rapport à la nature et à la société qui détermine le positionnement des acteurs de ce réseau.<br /><br /></span></p><div style="text-align: center;"><span style="font-size:85%;"><span style="font-style: italic;">relativistes prudents</span></span><span style="font-size:85%;"><span style="font-style: italic;"><span style="font-weight: bold; color: rgb(255, 255, 255);">-------------</span></span></span><span style="font-size:85%;"><span style="font-weight: bold;">Progrès</span></span><span style="font-size:85%;"><span style="font-style: italic;"><span style="font-weight: bold; color: rgb(255, 255, 255);">-------------</span></span></span><span style="font-size:85%;"><span style="font-style: italic;">positivistes scientistes</span></span><br /></div> <div style="text-align: center;"><span style="line-height: 115%; font-weight: bold;font-size:100%;" > -----------------------------------------------------------------------------></span><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" ><span style="font-size:85%;"><span style="font-style: italic;"><span style="font-weight: bold;"><br /><br /></span>Deux courants de l’AST distingués par leur rapport à la nature et à la société.</span></span></span><br /></div><p style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" ><br />Ainsi, pour l’ERE et pour l’AST, c’est ce qui constitue généralement l’apanage de l’autre (la science et la technologie pour l’AST, la nature et la société pour l’ERE) qui détermine les positionnements des différents courants internes par lesquels elles sont traversées. Et en matière d’AST comme d’ERE, lorsque les courants ainsi influencés s’expriment, les pratiques changent en conséquence et deviennent « responsables ».</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >L’exemple de la chimie est particulièrement intéressant : alors qu’elle peut permettre de clarifier, par les connaissances qu’elle produit, le positionnement des acteurs de l’ERE à l’égard de leur propre objet d’étude, les préoccupations de ces derniers la forcent en retour à s’interroger sur son rapport à la nature et à la société. Sa communication est ainsi susceptible de bénéficier doublement de la juxtaposition des éclairages de l’AST et de l’ERE. Mieux : en intégrant une réflexion constante sur les relations nature-chimie-technologie-société, elle peut contribuer à montrer la voie de leur rapprochement. Pourtant, nombreux sont les obstacles à cette maturation, comme nous le verrons dans notre prochain billet.<br /></span></p>REEhttp://www.blogger.com/profile/14040627823711364864noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3677126129196209390.post-73654143619389118962010-01-16T05:56:00.000-08:002010-04-16T09:27:34.230-07:00La "culture scientifique" : évidence ou oxymore ?<p style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Sa signification est évidente et la communauté scientifique défend unanimement sa « diffusion » auprès du <span style="font-style: italic;">grand public</span> : la « culture scientifique » est un bienfait à partager, si ce n’est à imposer.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Comme tous les concepts consensuels et évidents, il peut toutefois être intéressant de s’y arrêter pour l’interroger. Laissons de côté le second terme, en mentionnant simplement l’invitation pertinente qui nous est faite de la requalifier en « Culture Scientifique, Technique et Industrielle », portée notamment par le réseau des emblématiques CCSTI </span><span style="font-size:100%;">[i]</span><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >. Car de même que dans la réflexion sur le développement durable, la querelle entre les tenants du « durable » et les partisans du « soutenable » occulte la discussion essentielle sur le concept de « développement », l’extension de la culture scientifique à la technique et à l’industrie risque fort de masquer les implicites extraordinaires qui sont véhiculés par le terme de « culture » ; si ce n’est même un certain flou permettant d’en faire l’apanage d’une idéologie scientiste conquérante.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >En première approximation, les différentes et nombreuses définitions du mot « culture » peuvent être séparées en deux catégories principales : la culture <span style="font-style: italic;">individuelle </span>et la culture <span style="font-style: italic;">collective</span>. La première s’apparente à la « culture générale », parfois définie comme le fond minimal de connaissances et de compétences que devrait posséder un individu pour pouvoir s’intégrer dans la société. On y trouve les dates des grands événements historiques, la sensibilité artistique ou la capacité à participer à un sport populaire. La seconde est un ensemble de connaissances, de valeurs et de normes partagées par une communauté ou une société, transmises et imposées socialement. Ces caractéristiques construisent en retour une « identité culturelle » que l’on retrouve aussi bien dans les « cultures d’entreprise » que les « cultures animales ».</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Il apparaît dès lors que c’est dans la première acception du terme qu’il faut le plus souvent comprendre la notion de « culture scientifique » lorsqu’elle est employée par les partisans de sa promotion. Ces derniers, parallèlement, appartiennent à des communautés qui tirent leurs relatives cohésions de caractéristiques identitaires cette fois définies par des cultures qu’il faut entendre dans la seconde acception du terme : scientifiques, chimistes, médiateurs scientifiques constituent en effet autant de groupes humains partageant des connaissances, des valeurs et des normes <span style="font-style: italic;">collectives</span>, souvent relayées et/ou contrôlées par des institutions telles que les académies ou les sociétés savantes.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >La « culture scientifique » serait donc un patchwork de cultures <span style="font-style: italic;">collectives </span>disciplinaires proposées aux <span style="font-style: italic;">individus </span>au travers de diverses actions de communication. Mais sa promotion, lorsqu’elle est mal faite, risque du même coup de devenir une sorte d’injonction à entrer dans un moule lui-même modelé par des tendances corporatistes ou prosélytes. C’est ainsi qu’on se moque avec dédain et méchanceté des quelque 50% de français qui ne savent plus qui, de la Terre ou du Soleil, tourne autour de qui (oubliant du même coup que l’un n’est pas le contraire de l’autre</span><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" > </span><span style="font-size:100%;">[ii]</span><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" > et qu’en outre la réponse, totalement dépendante du référentiel choisi, est fausse dans les deux cas</span><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" > </span><span style="font-size:100%;">[iii]</span><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >) ; qu’on se moque, alors qu’une véritable « culture générale scientifique » réside bien plus dans la capacité à appréhender les enjeux des sciences et des technologies en cours d’élaboration (la science <span style="font-style: italic;">chaude</span>) que dans des connaissances <span style="font-style: italic;">refroidies </span>(stabilisées) et peu utiles pour comprendre le monde dans lequel on vit. Pire, c’est ainsi qu’on raille l’inculture scientifique, voire l’ignorance, de celui qui ne saura pas écrire CO<sub>2</sub> sans erreur typographique, oubliant cette fois qu’il ne faut voir là que conventions et qu’il fut un temps où les chimistes eux-mêmes l’écrivaient CO<sup>2</sup>…</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Contrairement à la culture artistique dont la dimension collective n’implique pas la condamnation de la transgression des règles au niveau individuel</span><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" > </span><span style="font-size:100%;">[iv], l</span><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >a culture scientifique, comme la culture religieuse, aurait parfois quelques tendances à vouloir non seulement <span style="font-style: italic;">diffuser</span>, mais également <span style="font-style: italic;">contrôler </span>les connaissances individuelles. Tous les scientifiques vous le diront : la science doit être partie intégrante de la culture. « <span style="font-style: italic;">Il ne saurait être de culture dans le monde d’aujourd’hui qui tienne la science à distance</span> », martelait récemment un collègue chasseur de mammouth auquel nous espérons ne pas faire trop de publicité en le citant</span><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" > </span><span style="font-size:100%;">[v].</span><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" > A ce stade, il est en effet difficile de le contredire. Quelques lignes plus haut, il écrit pourtant : « <span style="font-style: italic;">Au nom d’une spécialisation nécessaire et toujours exigeante, les scientifiques se sont isolés et ont laissé la science s’abstraire de la culture générale</span> ».</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >La science devrait donc quitter son statut de connaissance proposée pour adopter celui de savoir imposé, sous contrôle des scientifiques. Dès lors, le bel objectif culturel souhaité de tous ne risque-t-il pas de se voir contraindre et censurer par une science inquisitrice, au motif que la culture dont il dépend serait qualifiée de « scientifique » ? Comme le vocable de « développement durable » évoqué plus haut, celui de « culture scientifique » prend soudain, sous certaines plumes, des allures d’oxymore</span><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" > </span><span style="font-size:100%;">[vi]</span><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >.<br /></span></p><p style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Dans ces conditions, est-il possible de promouvoir une véritable culture scientifique, technique et industrielle qui ne souffre pas de ces travers et respecte l’individu, ses connaissances profanes et ses valeurs ? La réponse dans un prochain billet…</span><br />_______________________<br /><br /><span style="font-size:85%;"><br />[i] Les <span style="font-style: italic;">Centres de Culture Scientifique, Technique et Industrielle</span>, nés dans les années 70 et adhérents depuis 2001 à une charte signée avec le <span style="font-style: italic;">Ministère de la Recherche</span>, constituent l’essentiel des centres de science ouverts au public en France. Plus d’informations sur <a href="http://www.ccsti.fr/">www.ccsti.fr</a><br />[ii] Pour expliquer l’alternance des jours et des nuits, si le Soleil ne tourne pas autour de la Terre, c’est la rotation de la Terre sur elle-même et pas autour du Soleil qu’il faut invoquer.<br />[iii] Le Soleil et la Terre tournent autour de leur centre de gravité commun, si on fait abstraction de l’influence des autres planètes.<br />[iv] Jouer Chopin au métronome ou mélanger Mozart avec de la musique égyptienne, projeter des disques de lumière sur un mur ou y peindre un simple carré bleu… tout est bon si la démarche est assumée et justifiée.<br />[v] Allègre, C. <span style="font-style: italic;">Un peu de science pour tout le monde</span>, Fayard, 2003, Paris.<br />[vi] Une expression est un oxymore lorsqu'elle met côte à côte deux mots ayant des sens opposés et aboutissant à une image contradictoire et frappante pour la représentation, comme dans « un silence assourdissant ». <span style="font-style: italic;">Cette obscure clarté qui tombe des étoiles</span> (Corneille, <span style="font-style: italic;">Le Cid</span>, (1682), Acte IV, scène 3) en est probablement l’exemple d’expression oxymorique la plus souvent citée.</span><br /></p>REEhttp://www.blogger.com/profile/14040627823711364864noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3677126129196209390.post-90562537289284659352009-11-30T06:57:00.000-08:002010-04-16T10:19:02.448-07:00Est-ce que lorsque je respire, je pollue ?<p style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Dans le traitement et la compréhension des grandes problématiques environnementales, les chimistes ont à la fois le devoir de contribuer à la réflexion par le partage de leurs connaissances, et un intérêt évident à montrer l’utilité de leurs compétences dans la clarification de mécanismes écologiques qui échappent souvent, de par leur complexité, à la compréhension immédiate des non-scientifiques.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Aussi la question du réchauffement climatique, à la fois sensible et d’actualité, constitue-t-elle pour notre communauté une opportunité de communication intéressante à de multiples égards. La chimie, par sa maîtrise des transformations des composants de l’atmosphère, par sa compréhension des mécanismes du vivant, offre une vue imprenable sur les effets et les transformations du « CO<sub>2</sub> », du « CH<sub>4</sub> » et du « N<sub>2</sub>O », ainsi qu’un dispositif de contrôle des usages qui en sont faits. Ah ! Ces journalistes qui confondent CO<sub>2</sub> et CO, CO et Co, CO<sub>2</sub> et CO<sup>2</sup>… Heureusement, les chimistes veillent et savent réagir pour rectifier ces vilenies…</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Le lecteur assidu de cette chronique aura saisi la tonalité ironique de cette dernière phrase. Car en matière de savoirs utiles au citoyen, rien n’est plus futile et anecdotique que la position des indices et la taille des lettres dans notre alphabet chimique compliqué. A l’inverse, la compréhension du cycle du carbone revêt un intérêt fondamental, notamment pour lui permettre d’adapter son mode de vie en fonction de la perception qu’il a de ses propres émissions de gaz à effet de serre.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Primo Levi lui-même s’y attaché un jour, en contant l’épopée romanesque d’un atome de carbone [i], bien avant l’avènement des questions de changement climatique. Une problématique qui ravive toutefois le besoin de recourir au chimiste pour mieux comprendre, et se rassurer. Car si le CO<sub>2</sub> est un gaz à effet de serre, et puisque je sais que ce gaz est exhalé par mon organisme lorsqu’il respire, dois-je en déduire que je contribue quotidiennement au réchauffement climatique et que la suppression de mon <i>jogging</i> quotidien devrait constituer un de ces écogestes que je m’attache à introduire dans mon comportement ?</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Apparemment oui, si j’en crois le dernier numéro de <i>l’Actualité Chimique</i> [ii], qui reflète et véhicule une idée reçue relativement courante dans notre communauté. Et pourtant non, si j’y réfléchis un peu. Car dans un premier temps, il faudrait également dans ce cas considérer les émissions de CO<sub>2</sub> de l’ensemble de la biomasse terrestre : les humains ne sont pas les seuls à respirer. On commence à percevoir l’erreur de raisonnement : s’il est nécessaire de tenir compte des émissions de l’ensemble des écosystèmes, les contributions anthropiques d’origine fossiles deviennent vite négligeables et on conclut sans conviction que le problème n’existe pas. Alors ?</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Adoptons simplement la démarche de Primo Levi. D’où vient l’atome de carbone porté par la molécule de dioxyde de carbone que j’exhale en respirant ? Cette dernière fut assurément transportée par le sang depuis le muscle où elle a été produit par l’oxydation d’un sucre, lui-même apporté par le sang depuis le système digestif après ingestion d’un bon steak tartare, lui-même fabriqué par une vache toute étonnée d’être citée ici à partir de l’herbe d’un gras pâturage... Et cette herbe, où put-elle bien se procurer cet atome de carbone ? Dans le CO<sub>2</sub> atmosphérique, temporairement emprunté par le système herbe-vache-blogueur avant d’être restitué à la nature.</span></p><p style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Un carbone renouvelable, donc. Si du moins j’ai pris la précaution de retirer l’emballage plastique, issu de substances carbonées fossiles, avant de hacher la viande destinée à mon steak tartare [iii]. Que les chimistes s’investissent dans le débat, voire la polémique, est important. Mais qu’ils s’y égarent faute d’adopter l’approche systémique que nécessitent ces nouvelles problématiques [iv] ne sert ni le débat citoyen qu’ils prétendent clarifier, ni leur réputation de personnes ressources sur ces questions désormais fondamentales.<br /><br /><hr style="height: 3px; margin-left: 0px; margin-right: 0px; font-size: 78%;" width="33%"><br />[i] Levi, P. <i>Le Système périodique.</i> Edition Albin Michel – 1989. Edition originale : <i>Il Sistema Periodico</i> (1975). Voir également le billet « Les vertus du témoignage » <a href="http://lumiere.ens.fr/traces/2008/05/les-vertus-du-tmoignage.html">ici</a>.<br />[ii] Rubrique « Polémiques » : <a href="http://www.lactualitechimique.org/larevue_article.php?cle=2216">Carbone, vous avez dit carbone ?</a> <i>L’actualité Chimique</i>, 334, oct. 2009.<br />[iii] Qu’en est-il du méthane produit par la digestion des animaux ou les rizières ? Le carbone est là aussi bien renouvelable ; mais abandonnant sa tenue de CO<sub>2</sub>, il a endossé un habit de CH<sub>4</sub>, dont le forçage radiatif est 25 fois plus fort. Le système herbe-vache a donc renforcé l’effet de serre.<br />[iv] Il en va de même lorsqu’ils oublient la notion « d’énergie grise » en affirmant que « les centrales nucléaires n’émettent pas de CO<sub>2</sub> ». Le combustible nucléaire n’est-il pas issu de transformations chimiques lourdes et consommatrices d’énergie ?</span><br /></p>REEhttp://www.blogger.com/profile/14040627823711364864noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3677126129196209390.post-92229474630859800692009-09-15T15:21:00.000-07:002009-11-30T07:07:28.655-08:00La notion de "chaîne épistémique"<div style="text-align: justify;"><span style="font-size:100%;">Dans nos derniers billets et dans le contexte d’une science moderne fortement soumise à la pression sociale, nous nous interrogions sur la possibilité, pour le chimiste, de simultanément se montrer concerné par les effets négatifs des applications de sa discipline et de se sentir respecté pour les progrès techniques qui lui étaient dus. Invoquant le philosophe Ludwig Wittgenstein, nous explorions en l’occurrence la piste consistant en une approche de la chimie qui ne la considère plus comme une et indivisible, mais comme une juxtaposition de pratiques entretenant entre elles des airs des famille.<br /><br />Ayant réfuté le cloisonnement horizontal entre la chimie et ses applications, nous en proposons par suite un autre, transversal cette fois, entre des catégories que nous nommerons plus loin "chaînes épistémiques" (voir schéma). Ne nous méprenons pas : il n'est pas question ici de dire que la chimie n'existe pas et il sera toujours possible de parler de « la Chimie ». Notre propos consiste simplement à essayer de moduler sa perception unique et globale pour nous en faire une idée plus opératoire, notamment en termes de (bonne) conscience, de responsabilité et de communication publique. Ici encore [i], la pertinence théorique du choix épistémologique que l’on accepte de faire cède la place à ses implications sur la représentation et sur l'image de la science qu'ils confèrent respectivement aux scientifiques et à la société. </span></div><span style="font-size:100%;"><br /></span><span style="font-size:100%;"><img style="margin: 0px auto 10px; display: block; width: 400px; height: 137px; text-align: center;" alt="" src="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/14-709587.jpg" border="0" /></span><div style="text-align: center;"><span style="font-size:100%;"><p align="center"><em>Deux types différents de cloisonnements de la chimie.</em></p></span></div><div style="text-align: justify;"><span style="font-size:100%;"><p align="justify">Reprenons par exemple l’extrait d’un texte rédigé récemment par notre collègue Roger Barlet à l’intention de journalistes de la radio [ii] : "<span style="font-style: italic;font-size:100%;" >Il est bien vrai qu'on met l'accent, à juste titre, sur des composés qui, dans la vie de tous les jours, sont mis en cause pour leur nocivité : composés organiques volatils et formaldéhyde des peintures et vernis, pollution atmosphérique par l'ozone et les dioxydes d'azote, diffusion des pesticides dans les sols et les eaux, pollution par les PCB, etc.. mais il existe aussi une majorité de produits chimiques fort heureusement inoffensifs, présents dans notre vie quotidienne et appréciés pour leur intérêt ; médicaments, parfums, arômes et aliments ; quelques-uns d'entre eux d'ailleurs surmédiatisés comme les antioxydants (par exemple les polyphénols du vin ou du thé) ou les acides gras de l'huile de colza ou de l'huile de noix. Et que dire de l'oxygène, indispensable à la vie, et du glucose, aliment musculaire par excellence, tous deux produits chimiques dont on ne peut évidemment se passer</span><span style="font-size:100%;">". Peut-être le lecteur assidu de ce blog a-t-il deviné notre désaccord avec le contenu de ces lignes, mais tel n’est pas notre propos aujourd’hui, d’ailleurs tenu en d’autres circonstances [iii]. Le chimiste, parce qu'il se reconnaît dans une discipline qui englobe la recherche des mécanismes, les applications pharmaceutiques, les produits naturels et synthétiques, la distillation du vin et la synthèse de l'ypérite, vit dans un dilemme permanent (voir billet précédent). Mais faute de pouvoir réassigner ces pratiques dans des chaînes épistémiques indépendantes, il en vient à mettre en balance l'efficacité des médicaments ou les vertus de l’oxygène avec la nocivité des vernis et la pollution par l’ozone.</span><br /></p></span></div><div style="text-align: justify;"><br /><span style="font-size:100%;">Quel est ce cloisonnement vertical, que nous entendions plus haut substituer à une distinction science vs applications horizontale, qui serait propre à éviter ces travers ? Contre cette distinction horizontale, nous proposons d'une part que la chimie soit considérée comme un <span style="font-style: italic;">réseau</span> de connaissances, de compétences, d'attitudes et d'actions où s'entremêlent recherche fondamentale, applications et loi du marché, se nourrissant les uns les autres [iv]. Mais un réseau dans lequel il est possible de caractériser des chaînes épistémiques verticales débouchant sur des applications particulières, ces dernières ayant des effets secondaires (bénéfiques ou négatifs) propres. Une telle chaîne se structurera progressivement autour d'une application, chaque maillon en représentant l’un des aspects ou des enjeux (la recherche nécessaire à sa création, les avantages et inconvénients sociétaux, le profit financier qui peut en être tiré, l'éthique, etc.). Que l'un des acteurs de cette chaîne soit irresponsable, et c'est toute la chaîne qui peut s'emballer et produire les pires débordements, comme l’illustre l’encadré suivant.</span><br /><br /><span style="font-size:100%;">Cela ne signifie pas que la chimie soit toute entière mise en cause, mais l'existence du réseau justifie que tout acteur, à tout moment et en tout point, se rende attentif à ce qui peut découler de son travail et de celui de ses pairs. Que les chimistes pensent davantage en termes de régulation interne que de corporatisme ne pourrait que faire du bien à leur discipline. Pour ce faire, la penser une de manière globale et la séparer de ses applications ne nous semble décidément pas la meilleure voie pour la responsabiliser.</span><br /><span style="font-size:100%;">________________</span><br /><span style="font-size:85%;"><span style="font-weight: bold;"><a href="http://sites.radiofrance.fr/chaines/france-culture/emissions/theatre_europe/fiche.php?diffusion_id=67703&PHPSESSID=55f568df104057dc89352afab9771526">FARBEN</a>, une pièce de Mathieu Bertholet</span></span><br /><span style="font-size:85%;"><span style="font-style: italic;">Deux coups de feu dans l‘aurore. Mai 1915, Clara Haber perd son sang dans le gazon mouillé. Près d'elle, son fils, son mari. Pas de larme. Le mari ramasse son arme de service. Il quittera Berlin dans la journée, direction le front de l'Est.</span></span><br /><span style="font-size:85%;">Il y avait une fête hier soir dans cette villa. Des officiers, des scientifiques et leurs femmes ont fêté le succès de Fritz Haber et de son Institut dans les tranchées d’Ypres. On fêtait la mort de dix-huit mille hommes, tombés dans la première attaque au gaz de l'histoire. Ils étaient des ennemis, une bonne raison de fêter ça. Mais Clara s’est traînée dans la maison depuis le matin. Elle ne veut pas. Elle s’est disputée avec son mari pendant sa fête, avant de monter très tôt dans sa chambre. Elle ne peut plus supporter que leur science, leur travail aient mis fin à tant de vies.</span><br /><span style="font-size:85%;">Mais Fritz veut montrer qu’un Juif peut être aussi un bon Allemand. Il veut, à tout prix, aider l'Allemagne à faire une avancée significative dans les tranchées de la Grande Guerre. Depuis le début de la guerre, il concentre ses recherches sur une nouvelle arme : le gaz de combat. Il utilise les relations qu'il a tissées dans l’industrie chimique durant ses années de travail. Cherchant un produit qui soit facile à exploiter dans l’Allemagne isolée par le Blocus, il a trouvé des produits dérivés de la fabrication d’engrais. Après de nombreux tests dans son Institut et sur le terrain près de Cologne, la première attaque a eu lieu le 22 avril 1915.</span><br /><span style="font-size:85%;">"<span style="font-style: italic;">J‘ai écrit l'histoire d‘un homme et d‘une femme qui se sont consacrés à la science avec la même conviction : faire le bien de l'Humanité. Et pourtant, en une nuit, sont morts dix-huit mille soldats anonymes et la première femme chimiste de Breslau. Tous deux ont porté la responsabilité de leurs rêves. Fritz croyait en l’Allemagne, en la recherche et en la science. Clara en une science pour l‘'umanité. Cette pièce s‘appelle fArbEn, parce que les gaz de combat sont colorés, et parce que Clara rêve en couleurs. Une pièce sur des rêves, des rêves en couleurs, sur le pouvoir et les dangers de la science</span>". Mathieu Bertholet.</span><br /><span style="font-size:100%;"><span style="font-size:85%;">Durant la guerre, Fritz Haber développera encore de nombreux gaz, du gaz de chlore en passant par le gaz Moutarde jusqu'au Zyklon. A sa mort en 1934, il ignorera que quelques années plus tard, des millions d‘autres Juifs mourront de sa découverte dans les chambres à gaz.</span></span><br /><span style="font-size:100%;">________________</span><br /><span style="font-size:85%;">[i] Comme lorsque dans un <a href="http://lumiere.ens.fr/traces/2009/06/la-chimie-deresponsabilisee.html">billet précédent</a>, nous admettions qu’il était possible, si on le souhaitait et bien que nous ne partagions pas ce point de vue, de séparer par la pensée la science de ses applications.</span><br /><span style="font-size:85%;">[ii] Courrier du 18/01/09, retranscrit dans le SFC info en ligne de févier 2009.</span><br /><span style="font-size:85%;">[iii] Voir par exemple notre billet <a href="http://lumiere.ens.fr/traces/2008/06/tout-est-chimique.html"><span style="font-style: italic;">"Tout" est chimique ?</span></a></span><br /><span style="font-size:85%;">[iv] A titre programmatique, suggérons même que s'y ajoutent les acteurs sociaux et les règles éthique.</span></div>REEhttp://www.blogger.com/profile/14040627823711364864noreply@blogger.com1tag:blogger.com,1999:blog-3677126129196209390.post-31693928680729372902009-08-03T12:23:00.000-07:002009-10-05T11:26:14.981-07:00La chimie responsabilisée...<div align="justify">Avec un titre plus optimiste, reprenons notre réflexion à l'endroit où nous l'avions laissée dans notre dernier billet. Nous y montrions que la démarche intellectuelle consistant à ne retenir de la chimie que sa dimension épistémique, en considérant l’activité scientifique correspondante comme pure, fondamentale et déconnectée de ses applications, était risquée en termes non seulement d’incitation des chimistes à la responsabilité, mais aussi d’image sociale de la chimie [i]. Avant d’approfondir l’approche qui contredisait cette posture par des arguments d’ordre sociologique, interrogeons-nous tout de même quelques instants sur sa pertinence épistémologique.<br /><br />En premier lieu, est-il réellement possible de tracer une frontière stricte et étanche permettant de distinguer, d’un côté des pratiques « purement » scientifiques, et de l’autre des <i>applications</i> de la science ? Car quand elle utilise des instruments issus des plus hautes technologies ou les concepts issus d’autres disciplines, la recherche la plus fondamentale en chimie se nourrit directement des applications d’autres sciences, voire de la chimie elle-même. C’est ce qui conduit parfois même à considérer la science comme relevant partiellement de la technologie appliquée. Ainsi les nanotechnologies, rendues possibles par les développements de techniques ultrasophistiquées, sont devenues une mine inépuisable de sujets de recherche fondamentale. De même, lorsqu'un chercheur en électrochimie tente, à l'aide de microélectrodes connectées à un voltampéromètre cyclique, d’expliciter la réactivité de molécules organométalliques, il utilise des techniques issues de diverses disciplines pour pratiquer une science à son tour fondamentale. Mieux, il lui arrive même de perfectionner ces techniques à la lumière de ses expérimentations ; c’est ainsi que sont nées les ultramicroélectrodes. Que dire enfin des nombreux laboratoires de RMN théorique, dont les recherches (fondamentales) sont directement liées à l’existence de cette technique ; mais aussi à ses applications et à son perfectionnement.<br /><br /><a href="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/if-767110.jpg"><img style="margin: 0px 10px 10px 0px; float: left; width: 310px; height: 202px;" alt="" src="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/if-767099.jpg" border="0" /></a>Car l’intrication entre la science et ses applications se situe également dans l'intention : combien de dossier de financement ne sont-ils pas rédigés, combien de recherches ne sont-elles pas conduites, dans la perspective des applications qui pourraient en résulter ? Lorsque Pierre Potier recherchait la vinblastine dans la pervenche de Madagascar avant de synthétiser la Navelbine®, lorsqu’il découvrait le Taxotère® en cherchant à synthétiser le taxol à partir de l’if américain, n'était-ce pas pour fabriquer des anticancéreux ?</div><span style="font-size:85%;"><span style="font-style: italic;"><br />L'if (Taxus baccata), à la base du taxotère®. CNRS Phototèque/ALLORGE Lucioe (UPR 2301, ICSN, Gif-sur-Yvette).</span></span><br /><div align="justify"><br />Or ne pratiquait-il pas pourtant une science chimique des plus nobles ? De la même manière, les synthèses conduisant à la vitamine B12 réalisées par Woodward allaient resservir dans une multitude de synthèses ultérieures. Enfin, les chercheurs en toxicologie travaillant à comprendre les effets des nouvelles substances de synthèse sur les animaux et les humains le font dans le cadre d’un objectif très précis et particulièrement appliqué ; en cela, ils n’en font pas moins de la science.<br /><br />Les exemples pourraient être déclinés à l’infini. On peut certes comprendre l'envie de séparer la science de ses applications pour insister sur la spécificité de la découverte scientifique, de la démarche du chercheur, de son mode de production de la vérité ; pour éviter de voir la science ternie par des applications ignominieuses, ou encore les effets indésirables et imprévus de ses belles découvertes. Cette envie passe très certainement par le rejet de l'expression « science appliquée », qui établit un continuum (que d’aucuns considèrent mou et insatisfaisant) entre la noblesse de la pensée créatrice et l’avilissement du geste technique répété à l’infini. Mais elle risque également d'occulter les interdépendances majeures qui existent entre science et technologie, de donner de la production des connaissances l’image simpliste d’une ligne droite et descendante allant des recherches fondamentales aux applications. Une conception non seulement constamment contredite par les faits, comme nous l’avons montré plus haut, mais qui ne prépare pas non plus les esprits à la compréhension d’une science moderne, intégralement inscrite dans son tissu économique, technologique, environnemental, politique et social, et que certains sociologues des sciences ont par suite qualifiée de <i>post académique</i> [ii].<br /><br />Revenons à présent comme convenu à une appréciation plus sociologique de la chimie. Le point de vue que nous entendons défendre ici, et qui sous-tend une grande partie de la réflexion développée dans le cadre de ce blog est que la conception que les chimistes se font de leur propre discipline et de ses relations avec la société, l’environnement, la connaissance académique et la culture en général, détermine une grande partie de ces relations et, par suite, de l’image sociétale de la chimie.<br /><br />A cet égard, une pierre angulaire de la perception de la chimie par le grand public semble tourner autour de l’idée de responsabilité. Responsabilité à l’égard du devenir des découvertes, de leur impact sur le monde technologique, des valeurs humaines qu’elles bousculent en apparaissant trop tôt ou trop vite, de leurs effets secondaires, de leurs ratés… Car la société exige désormais de lui qu'il réponde des applications auxquelles ses recherches ont conduit. Alors qu’une solution serait précisément de nier que de telles responsabilités lui échoient, de s’en dédouaner en séparant par exemple la recherche de ses applications, cette demande sociale oblige le chimiste à se préoccuper des applications de la chimie, quelles qu’elles soient, et à les considérer comme faisant partie intégrante de sa discipline. Mais alors, comment à la fois lui éviter d’endosser des responsabilités qu’il n’a pas et lui permettre d’être reconnu pour ses « bonnes » découvertes ? Et comment surtout lui permettre de préserver sa foi dans une discipline qu’il a choisie par passion, alors que tombent les coups au rythme des accidents et des mises en cause ?<br /><br />Une solution réside peut-être dans la réponse à la question que nous posions en conclusion de notre dernier billet : est-il toujours pertinent de parler de « la » chimie ? La question peut surprendre et il est peut-être nécessaire de la reformuler : en d’autres termes donc, existe-t-il une unité si grande de ce que nous mettons usuellement derrière les pratiques de tous les chimistes confondus, pour justifier qu'on ne pense toujours ces pratiques qu'en tant que domaine unique et indivisible ? Autrement dit, encore, la conception faisant de la chimie un champ épistémique [iii] homogène, aux frontières bien définies, n’est-elle pas préjudiciable à sa redéfinition dans le contexte sociétal du XXIème siècle, très différent des conditions dans lesquelles elle a connu son âge d’or, entre la Révolution Industrielle la Guerre Froide ? On comprend certes l’envie de préserver cette conception, au moment où les « sciences chimiques » se cherchent une place dans les organigrammes des instituts de recherche et où certaines entreprises, de cosmétiques par exemple, renient leur appartenance à la chimie pour ne pas effrayer les consommateurs de leurs produits. Mais la nouvelle donne scientifique, économique et sociale, d’où émergent les difficultés de communication que l’on sait, nécessite probablement plus une révolution en forme de changement de paradigme qu’une résistance corporatiste telle que celle qui a animé notre communauté ces dernières années.<br /><br /><a href="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/Chr-333-716205.bmp"><img style="margin: 0px 0px 10px 10px; float: right; width: 219px; height: 320px;" alt="" src="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/Chr-333-716151.bmp" border="0" /></a>Le philosophe Ludwig Wittgenstein (1889-1951) explicite à sa façon la remise en question que nous proposons : « <i>Les philosophes ont la fâcheuse tendance à vouloir penser qu'il y a une essence derrière un concept. En réalité,</i> explique-t-il, <i>beaucoup sont des concepts d'"air de famille". Considère, par exemple, les processus que nous nommons "jeux". Je veux dire les jeux de pions, les jeux de cartes, les jeux de balles, les jeux de combat, etc. Qu'ont-ils tous de commun ? Ne dis pas "Il doit y avoir quelque chose de commun à tous, sans quoi ils ne s'appelleraient pas des jeux" mais regarde s'il y a quelque chose de commun à tous. Car si tu le fais, tu ne verras rien de commun à tous, mais tu verras des ressemblances, des parentés, et tu en verras toute une série (...). Je ne saurais mieux caractériser ces ressemblances que par l'expression d'"airs de famille" ; car c'est de cette façon-là que les différentes ressemblances existant entre les membres d'une même famille (taille, traits du visage, couleur des yeux, démarche, tempérament, etc.) se chevauchent et s'entrecroisent. »</i> (<i>Recherches philosophiques</i>, Gallimard, 2005).</div><div align="right"><em><span style="font-size:85%;">Ludwig Wittgenstein (1889-1951).</span></em></div><div align="justify"></div><div align="justify">Ainsi, tous les domaines de ce que nous nommons « la Chimie » ont évidemment quelque chose en commun ; à commencer par le socle commun de connaissances acquis lors de leurs années d’études par ceux qui se reconnaissent comme chimistes ; en continuant par le concept de molécule ou, plus précisément comme le propose Hervé This [iv], les « réarrangements atomiques ». Mais cela suffit-il à assurer une homogénéité et une unicité à des pratiques aussi diversifiées que celles de la chimie ? Ne devrions-nous pas commencer par y voir simplement des <i>airs de famille</i>, susceptibles de faciliter notre rapport à cette hydre à plusieurs têtes ?<br /><br />C'est l’hypothèse que nous étudierons dans notre prochain billet.<br />______________________<br /><span style="font-size:85%;">[i] Cette posture est qualifiée d’<i>internaliste</i> par le sociologue Michel Callon (Callon, M. (1989) <i>La science et ses réseaux</i>, Editions La Découverte/Conseil de L'Europe/UNESCO, Paris, p. 66). La conception internaliste des sciences se caractérise par : « l’autonomie des connaissances ; le développement des concepts, théories et hypothèses indépendamment des influences extérieures ; la centration sur les contenus, le noyau dur de l'activité scientifique ; l'utilisation d'une méthode qualifiée de rationnelle ou d'expérimentale susceptible de résister aux contingences historiques et sociales ; la séparation tranchée entre le noyau dur et ses contextes. »</span><br /><span style="font-size:85%;">[ii] Voir </span><span style="font-variant: small-caps;font-size:85%;" >Nowotny</span><span style="font-size:85%;">, H. </span><span style="font-variant: small-caps;font-size:85%;" >Gibbons</span><span style="font-size:85%;">, M. & </span><span style="font-variant: small-caps;font-size:85%;" >Scott</span><span style="font-size:85%;">, P. (2003) <i>Repenser la science – Savoir et société à l’heure de l’incertitude</i>, Belin, Paris. D’autres chercheurs tels que Dominique Pestre vont plus loin en considérant qu’il en a toujours été ainsi, ce qui délégitime le qualificatif « post-académique ». Voir par exemple : </span><span style="font-variant: small-caps;font-size:85%;" >Pestre</span><span style="font-size:85%;">, D. (2003) <i>Science, argent et politique</i>, Sciences en questions, Quae, Paris. Peut-être le phénomène est-il cependant devenu plus sensible ces dernières décennies et mérite-t-il, par suite, d’être nommé explicitement.</span><br /><span style="font-size:85%;">[iii] Un champ épistémique est une aire de la connaissance structurée par un savoir particulier, lequel se forme indissociablement par l’articulation d’un projet cognitif (des concepts, des hypothèses, des représentations structurées) et d’un ensemble de pratiques.</span><br /><span style="font-size:85%;">[iv] </span><span style="font-variant: small-caps;font-size:85%;" >This</span><span style="font-size:85%;">, H. (2009) <i>La Sagesse du Chimiste</i>, L’œil neuf, Paris.</span></div>REEhttp://www.blogger.com/profile/14040627823711364864noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3677126129196209390.post-57119115999104143862009-06-25T08:15:00.000-07:002009-06-25T08:27:11.058-07:00La chimie déresponsabilisée...<div style="text-align: justify;">Lorsque le chimiste affirme « <span style="font-style: italic;">La Chimie est partout !</span> », c’est non seulement pour signifier qu’elle est capable d’expliciter la plupart des phénomènes naturels qui se jouent au niveau moléculaire, mais également pour rappeler que les <span style="font-style: italic;">productions </span>de la Chimie ont envahi nos vies et interviennent désormais, sans que l’on puisse plus s’en passer, dans la plupart de nos gestes quotidiens.<br /><br />Pourtant, un certain malaise s’installe lorsque le citoyen, non acquis à la <span style="font-style: italic;">cause </span>de la Chimie mais néanmoins honnête, s’inquiète du fait que ce « partout » désigne tout de même parfois des applications dont le chimiste aurait du mal à tirer fierté. Voilà donc la noble entreprise de la Chimie qui souffre des usages malveillants, illicites et clandestins qui en sont faits…<br />Il en va de même lorsqu’à l’autre bout du monde, une fabrique d’insecticides mal entretenue enveloppe une ville entière d’un nuage de mort et tue en quelques heures des milliers de personnes. Voilà cette fois la Chimie meuépistémologiertrie par des problèmes socio-économiques et politiques, qui ne relèvent pourtant pas de ses prérogatives…<br />Les choses se compliquent encore lorsque des mouvements associatifs de défense de la santé publique attaquent ouvertement les « substances chimiques » présentes dans notre environnement et responsables des pollutions du même nom. Et voilà que les chauffages domestiques, les véhicules individuels et les éruptions volcaniques viennent polluer non seulement notre atmosphère, mais également l’image d’une Chimie qui s’est contentée de nommer et d’analyser les polluants incriminés…<br /><br />Dans tous les cas, le chimiste qui n’a pas participé à la synthèse de l’ypérite, qui ne faisait pas partie du Comité Directeur de <span style="font-style: italic;">Union Carbide</span> en 1984 et qui éteint toujours son moteur lorsque sa voiture est arrêtée, est heureusement hors de cause et peut avoir la conscience tranquille. Non, c’est <span style="font-style: italic;">La</span> Chimie qu’il faut défendre dans tous ces cas. En répétant qu’elle est une discipline scientifique belle et humaniste et, surtout, qu’elle n’est pas responsable des usages qui en sont faits !<br />Les solutions sont multiples et tout est permis pour assurer sa sauvegarde. Certains vont même jusqu’à proposer de supprimer de notre vocabulaire la notion de « science appliquée » pour la replacer par les « applications de la science » [i]. Pour eux, la Chimie ne serait « <span style="font-style: italic;">ni "les pesticides", ni "les additifs", ni "la pollution", ni les gaz de combat… Ceux qui soutiendraient de telles idées se tromperaient, et se tromperaient de combat, confondant la science et ses applications technologiques ou techniques.</span> » [ii]…<br /><br />Exclure les applications du périmètre de la science, voilà une manière radicale d’éviter tout risque qu’elle soit corrompue par les charlatans, les brigands, les incompétents et les ignorants. Et surtout un bon moyen d’éviter d’avoir à se préoccuper des usages qui en seront faits. La Chimie, en tant qu’exploration de la matière par le pouvoir de l’esprit, en tant que confrontation entre l’Homme et la Nature, est pure et noble. Le reste ne la regarde pas ; c’est l’affaire de l’industrie, du politique ou du citoyen…<br /><br /><span style="font-weight: bold;">Sauf que… non. Ca ne marche pas ; ça ne marche plus. Plus du tout. Et c’est un peu trop facile. Stop… Rewind…</span><br /><br />Que le grand Pasteur lui-même ait considéré comme nuisible le vocable de « sciences appliquées » [iii] n’implique ni que cette idée soit pertinente, ni qu’elle ne soit pas devenus nocive un siècle plus tard. Dans une économie et une humanité mondialisées, le chimiste doit être responsable. Responsable et préoccupé, attentif et actif. A l’égard de ce qu’il fait individuellement certes, mais également des conséquences, bonnes et mauvaises, des activités de sa communauté toute entière. C’est-à-dire des usages et des applications, justement, d’une science chimique intégralement inscrite dans un tissu économique, technologique, environnemental et même politique et social, où tout se tient et tout est lié.<br /><br />Libre à chacun de se façonner son épistémologie personnelle et de s’inventer une définition de la science réduite à ce qu’il veut. Sauf si, sous prétexte de la défense d’une Chimie pure, elle porte en elle le germe d’une forme de déresponsabilisation des chimistes et risque, bien pire encore, de donner à la société l’image d’une Chimie qui ne se soucie pas de ce qu’il advient de ce qu’elle produit de connaissances, de nouveaux matériaux et d’innovations technologiques.<br />Car la question n’est pas qu’épistémologique ; si la science réelle est ce qu’elle est, l<span style="font-style: italic;">’idée de Science</span> peut bien être rêvée en fonction des impératifs et des intérêts programmatiques ou normatifs du moment. Non, la question est aussi et surtout d’ordre sociétal et communicationnel ; car la définition que les chimistes construisent de leur discipline conditionne à la fois leur propre sentiment de responsabilité et le regard que la société porte sur eux en retour.<br />Pour l’ensemble de ces raisons, nous affirmons avec force que toute tentative de définition de la Chimie d’aujourd’hui se doit, absolument, d’y inclure « l<span style="font-style: italic;">es pesticides, les additifs, la pollution et les gaz de combat</span> ». Même au risque d’écorner les idées de pureté et de noblesse qu’on souhaiterait lui voir conserver.<br /><br />Dans une vision moderne et réaliste de la science telle qu’elle se pratique au XXIe siècle, nourrie d’intrications fortes avec la finance, la politique et la technologie, la conception réductrice d’une Chimie qui ne serait pas « appliquée » et se situerait simplement en amont de ses applications nous semble de toute façon hautement contestable du point de vue épistémologique lui-même, ce que nous discuterons brièvement dans notre prochain billet.<br />Mais nous nous interrogerons surtout sur la pertinence et l’origine de cette idée, largement partagée par notre communauté, d’une Chimie <span style="font-style: italic;">une</span>, cohérente et homogène, écrite avec un C majuscule, qui transforme ses excès en contradictions internes et oblige les chimistes aux pires contorsions pour les justifier. « La » Chimie existe-t-elle et est-elle une bonne idée ? Ne dit-on pas « les » mathématiques ?<br />---<br /><span style="font-size:85%;">[i] http://hervethis.blogspot.com/2009_02_01_archive.html<br />[ii] Communiqué de presse de l’ouvrage <span style="font-style: italic;">La sagesse du chimiste</span>, Hervé This, <span style="font-style: italic;">L’œil neuf</span>, mars 2009.<br />[iii] « <span style="font-style: italic;">Souvenez vous qu’il n’existe pas de sciences appliquées mais seulement des applications de la science</span> » ; propos rapportés par Hervé This dans la référence citée en note [i].</span><br /><br /></div>REEhttp://www.blogger.com/profile/14040627823711364864noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3677126129196209390.post-7736854340238772812009-05-15T09:48:00.000-07:002009-05-15T10:08:37.685-07:00Top models<div style="text-align: justify;">Dans notre dernier billet, nous analysions un défaut d’ordre didactique relativement fréquent en matière de communication de la chimie : la confusion dans l’emploi des notions de molécule et de substance. Pour l’illustrer, nous suggérions notamment qu’il était possible de formuler plus adroitement, et de manière moins ambiguë, la proposition : « <span style="font-style: italic;">Les chimistes font réagir des molécules chimiques entre elles pour fabriquer de nouveaux matériaux</span> ». C’est ainsi que certains de nos lecteurs nous ont proposé, à juste raison, de remplacer l’emploi des « molécules chimiques » par des expressions telles que « substances réactives », « réactifs chimiques » ou « composés chimiques ».<br /><br />Certains, au contraire plus sceptiques, nous ont rétorqué avec étonnement : « <span style="font-style: italic;">Composé chimique et molécule ne sont-ils pourtant pas synonymes ?</span> ». Nous répondrons par la négative, en leur faisant remarquer que les deux termes se placent à des niveaux de description totalement différents : 1/ Les notions de composé moléculaire, de mélange, de substance, de propriété chimique, etc. sont macroscopiques et tangibles ; 2/ Les notions d’atome, de molécule, de site actif, d'orbitale, de couche électronique, de charge partielle, etc. sont microscopiques [i] et le plus souvent <span style="font-style: italic;">abstraits</span>.<br /><br />Pourquoi les chimistes oublient-ils si facilement cette distinction ? Probablement parce qu’ils sont habitués à expliciter les propriétés macroscopiques de la matière par ses caractéristiques microscopiques, exercice dans lequel ils excellent d’ailleurs. Que l’on songe simplement aux pKa des acides organiques : parce que ce sont des grandeurs thermodynamiques macroscopiques, elles n’ont aucun sens au niveau moléculaire ; les chimistes en explicitent pourtant les différences et variations en comparant les structures des molécules correspondantes.<br /><br />Non, <span style="font-style: italic;">composé chimique</span> et <span style="font-style: italic;">molécule </span>ne sont pas synonymes. Ils sont parents, ou homologues, mais dans des registres incommensurables, comme le sont le génotype et le phénotype d’un être vivant.<br /><br />D’autres écueils du même type existent d’ailleurs dans le domaine de la communication de la chimie. Au-delà de l’incessante alternance entre les mondes du réel et de l’abstrait, le scientifique peut en effet être amené à utiliser simultanément différents modèles théoriques pour illustrer une même réalité [ii]. Et de ce fait, son aisance et son habitude de jongler avec eux peuvent là encore l’amener à passer inconsidérément de l’un à l’autre, voire à les mélanger dans son discours. On verra ainsi très souvent, dans un même exposé, les modèles de Bohr ou de Rutherford côtoyer des modèles quantiques de l’atome (figure), sans que le communiquant ne prenne la peine de s’attarder (ou simplement de s’étonner) sur le fait que dans le premier modèle, les électrons qui possèdent l’énergie potentielle la plus élevée sont les plus éloignés du noyau, alors que cette règle est continuellement transgressée dans le second modèle.<br /><br /><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/modeles_atome-779644.jpg"><img style="margin: 0pt 10px 10px 0pt; float: left; cursor: pointer; width: 320px; height: 120px;" src="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/modeles_atome-779642.jpg" alt="" border="0" /></a><br /><span style="font-style: italic;">Différents modèles de l'atome.</span><br /><span style="font-style: italic;">De l’électron 1s et de l’électron 2p, lequel est le plus proche du noyau ?</span><br /><br /><br /><br />Cette constatation est vraie pour les modèles, mais elle l’est aussi pour les représentations graphiques et schématiques. Des molécules organiques sont ainsi souvent représentées sur un même document selon des formalismes très variés, mais adaptés au propos du moment : formule « brute » pour la composition de la molécule, formule « semi-développée plane » pour les groupes fonctionnels, formule « spatiale » en représentations de Cram, Newman ou Haworth pour la stéréochimie, formule « en bâtonnets » pour la structure électronique… Là encore, le manque de passerelles entre les différentes représentations est préjudiciable à la compréhension du non-chimiste.<br /><br />Pour peu qu’on lui en donne les clefs et qu’on lui laisse le temps de se les approprier, ce dernier sera capable de faire le lien entre les différents modèles et représentations qu’on lui propose. Mais cela suppose également qu’on lui indique les transitions entre les différents mondes sous-tendus par ces modèles et qu’on lui montre les chemins qu’il peut emprunter pour y tisser les liens nécessaires à leur véritable compréhension. A ce titre, une vigilance constante de la part du communiquant est de mise, et il va sans dire que limiter le nombre de modèles et de représentations simplifiera dans tous les cas grandement la compréhension des interlocuteurs non-initiés.<br /><br />Ou, pour reprendre la métaphore du langage du mois dernier, qu’il nous suffise de dire qu’il ne viendrait à l’idée de personne d’enseigner deux langues étrangères en même temps en en mélangeant les outils (c’est-à-dire le vocabulaire) et les conditions d’utilisation (les règles de grammaire)...<br /><br /><br /><span style="font-size:85%;">[i] La notion de « corps pur », simple ou composé, est à cet égard particulièrement intéressante car elle fait le lien entre ces deux catégories. Elle désigne en effet une substance pure (macroscopique) tout en faisant référence à la nature des molécules (microscopiques) qui la composent.<br />[ii] Eastes, R.-E. L</span><span style="font-style: italic;font-size:85%;" >es pièges de la médiation scientifique – Propositions de « bonnes pratiques »</span><span style="font-size:85%;">, L’actualité Chimique, </span><span style="font-style: italic;font-size:85%;" >Le chimiste et le profane : partager, dialoguer, communiquer, vulgariser, enseigner</span><span style="font-size:85%;">, n°280-281, nov-déc 2004.</span></div>REEhttp://www.blogger.com/profile/14040627823711364864noreply@blogger.com1tag:blogger.com,1999:blog-3677126129196209390.post-9527208350799299212009-01-30T07:58:00.000-08:002010-04-16T09:33:52.436-07:00Gare aux pléonasmes !<div style="text-align: justify;">Le temps d’un billet, quittons l’analyse philosophique du terme "chimique" pour revenir à des considérations didactiques plus pragmatiques. Il est en effet un défaut particulièrement répandu chez les chimistes, qui conduit à des formulations bizarres, voire nuisibles à la compréhension : la confusion dans l’emploi des notions de "substance" et de "molécule".<br /><br />Dans un article du numéro spécial de <span style="font-style: italic;">l</span><span style="font-style: italic;">’Actualité Chimique</span> intitulé <span style="font-style: italic;">Le chimiste et profane</span>, nous évoquions la facilité avec laquelle le scientifique passe du monde réel au monde théorique et abstrait qu’il s’est construit pour l’expliciter. Physique quantique, thermodynamique chimique, calculs menés à l’aide de diverses transformées mathématiques… autant d’exemples illustrant la virtuosité des scientifiques qui jonglent avec les concepts et raisonnent dans le monde de l’abstraction.<br />Or cette aptitude peut rapidement se muer en défaut lorsque, oubliant de revenir au monde réel, le scientifique s’engage dans une pratique de communication. Dans l’article mentionné plus haut, nous écrivions notamment : "[…] <span style="font-style: italic;">entraîné à jongler avec les faits avérés et les lois élaborées pour en rendre compte, </span>[<span style="font-style: italic;">le scientifique</span>]<span style="font-style: italic;"> ne "sent" plus la nécessité d’identifier convenablement les deux aspects, de préciser ce qui relève de la réalité et ce qui est modélisation ou simulation. Ainsi à la question : "</span>Pourquoi les carottes sont-elles oranges ?<span style="font-style: italic;">", il pourra par exemple répondre en termes de niveaux d’énergie dans les polyènes, dont le carotène, responsable de cette couleur, est un représentant. A celle de l’existence d’un état liquide de l’eau salée à - 20 °C, on en a même vu évoquer les potentiels chimiques des phases solide et liquide devant des enfants... Pour le chimiste, le lien semble direct ; mais combien de passerelles entre le monde réel et le monde théorique emprunte-t-il en même temps pour faire ce lien ? En tout état de cause, trop pour le public non initié. En effet, il ne viendrait à personne l’idée d’enseigner les rudiments d’une langue étrangère et dans les minutes qui suivent, de mélanger allègrement les mots des deux langues dans une même phrase…"</span>.<br /><br />L’exemple le plus courant de ce défaut est illustré par l’anecdote suivante. Lors d’une <span style="font-style: italic;">Fête de la Science </span>locale, un doctorant en chimie tente (et c’est tout à son honneur) d’expliquer aux passants les objectifs et les méthodes de la synthèse organique qu’il vient de réaliser. Pour ce faire, il agite un petit tube à essai, bien fermé, contenant quelques centaines de milligrammes d’une certaine poudre blanche. Et lorsque qu’il parle de cette poudre, il évoque "sa molécule".<br />Cela ne fait pourtant aucun doute : les chimistes manipulent non pas des molécules, mais bien des substances, pures ou mélangées, à l’échelle macroscopique de leurs expérimentations. Mais ce doctorant, à la fois parce qu’il a en tête les étapes mécanistiques de sa synthèse et parce qu’il s’est assuré du degré de pureté de sa poudre blanche, ne peut la voir que sous la forme d’une représentation formelle et symbolique des molécules qui la composent.<br /><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/substance-737655.jpg"><img style="margin: 0pt 10px 10px 0pt; float: left; cursor: pointer; width: 320px; height: 234px;" src="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/substance-737649.jpg" alt="" border="0" /></a><br />Quels sont les risques de cette confusion, en termes de communication ? L’ouvrage <span style="font-style: italic;">Tout est chimie !</span> déjà évoqué dans les deux billets précédents, nous en donne l’illustration à la page 41 : "[<span style="font-style: italic;">Les chimistes</span>]<span style="font-style: italic;"> se servent de </span>[<span style="font-style: italic;">leurs</span>]<span style="font-style: italic;"> récipients pour mesurer, peser, faire réagir des molécules chimiques entre elles et fabriquer de nouveaux matériaux</span>". La molécule, en tant que concept de la chimie, est chimique (dans le sens 2 de la classification établie dans le numéro d’octobre-novembre 2008). Les auteurs emploient donc l’adjectif "chimique" pour lui ajouter une dimension supplémentaire : celle de "réactif".<br /><br /><span style="font-size:85%;"><span style="font-weight: bold;">Figure 1 :</span> <span style="font-style: italic;">Tout est chimie !</span> Une illustration probablement non intentionnelle de la confusion entre substance et molécule.<br /><br /></span>Ainsi, pour être tombés dans le piège de la confusion entre réel et abstraction, ils laissent deux choix au jeune lecteur : 1/ considérer que l’éditeur a laissé passer une coquille (en l’occurrence un pléonasme) et 2/ imaginer, parce qu’au contraire il lui fait confiance, qu’il existe des molécules "non chimiques"…<br />Le lecteur saura-t-il nous proposer l’expression par laquelle il aurait fallu remplacer celle de "molécule chimique" pour éviter tous les écueils en même temps ? Nous y reviendrons dans notre prochain billet.<br /></div>REEhttp://www.blogger.com/profile/14040627823711364864noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3677126129196209390.post-68087281080705424572009-01-30T07:09:00.000-08:002009-01-30T07:57:00.813-08:00Chimie et pollution chimique<div style="text-align: justify;">Depuis plusieurs mois, nous essayons de montrer que les problèmes de communication qui se cristallisent autour de l’emploi du terme « chimique » sont essentiellement dus aux différences de perception qu’ont de cet adjectif les chimistes et les non-chimistes, ces perceptions se référant aux trois types de conceptions décrits dans le billet intitulé <a href="http://lumiere.ens.fr/traces/2008/09/chimique-comment-des-diffrentes-faons.html"><span style="font-style: italic;">Des différentes façons d'être chimique</span></a>.<br />Dans le <a href="http://lumiere.ens.fr/traces/2008/11/naturel-et-chimique.html">billet du mois dernier</a>, nous décrivions par exemple les problèmes de compréhension qui pouvaient résulter de l’emploi dans ses sens 2 ou 3 (conceptualisé par la chimie ou relevant de son domaine d’étude) de l’expression "produit chimique" par les chimistes, alors que les non-chimistes perçoivent généralement cette expression dans son sens 1 (synthétisé par la chimie) [i].<br />A l’inverse, à cause de la position défensive adoptée par les chimistes, ce sont eux qui parfois commettent l’erreur de ne percevoir l’adjectif "chimique" que dans son sens 1, quant il est employé par les non-chimistes dans ses sens 2 ou 3. C’est le cas de la "pollution chimique".<br /><br />Lorsqu’il est nécessaire de distinguer différents types de pollutions (et nous parlons ici bien de <span style="font-style: italic;">types</span>, et non de <span style="font-style: italic;">sources</span>), une approche intuitive consiste à les séparer selon les grandes classes de savoir qui permettent de les décrire. Ainsi la pollution <span style="font-style: italic;">bactérienne </span>d’une rivière sera dite "biologique" (que l’origine en soit anthropique ou naturelle) et les interférences produites sur les appareils électroniques par les éruptions solaires seront identifiées à de la pollution "électromagnétique". De la même manière, l’effet de serre additionnel issu de la transformation du CO2 en méthane par les élevages bovins ou les rizières sera qualifié de pollution "chimique", dans les sens 2 et 3 du terme.<br />Impossible de s’en plaindre, puisque les chimistes eux-mêmes répètent à l’envie que "tout est chimique". Et pourtant dans ces cas-là, combien de fois la corde sensible du chimiste soucieux de l’image de sa discipline ne vibre-t-elle pas, par crainte que cette pollution soit soudain attribuée à la chimie et à son industrie ?<br /><br /><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/Pollution-718954.jpg"><img style="margin: 0pt 0pt 10px 10px; float: right; cursor: pointer; width: 240px; height: 320px;" src="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/Pollution-718938.jpg" alt="" border="0" /></a>C’est ce qui arrive aux auteurs de l’ouvrage <span style="font-style: italic;">Tout est chimie ! </span>que nous avons commencé à étudier le mois dernier [ii], lorsqu’ils font dire à Tante Julie (page 48) : "[…] <span style="font-style: italic;">ce n’est pas la chimie qui est à la base de toutes les pollutions que nous voyons à la télé. C’est plutôt la façon dont nous vivons au quotidien qui est la cause de ces désastres</span> […]" (figure ci-contre).<br />Ainsi donc, et pour résumer la problématique générale développée dans nos dernières chroniques, les chimistes utilisent l’adjectif <span style="font-style: italic;">chimique </span>pour apposer leur marque sur des catégories du monde (au sens 2 et 3, comme dans le cas des "produits chimiques naturels"), mais lorsque ce sont les non-chimistes qui l’emploient dans les sens 2 et 3 (l’exemple de la "pollution chimique" étant particulièrement significatif), ils l’entendent au sens 1 et s’en offusquent.<br /><br /><span style="font-size:85%;"><span style="font-weight: bold;">Figure 1 :</span> Tout est chimie ! La pollution chimique représentée dans le sens 1 de l’usage du terme « chimique » pour pouvoir mieux le dénoncer ensuite.</span><br /><br />Comment se dégager de cette difficulté ? En prenant la peine de clarifier les différents sens du terme "chimique" d’une part, en l’employant avec précaution d’autre part, et en substituant certaines expressions équivoques par d’autres. C’est ce qui fera l’objet de notre prochain billet.<br /><br /><span style="font-size:85%;">[i] Voir la démonstration dans le <a href="http://lumiere.ens.fr/traces/2008/01/parfait-petit-chimiste-recherche.html">billet du 31 janvier</a>.<br />[ii] Joussot-Dubien, C. Rabbe, C. <span style="font-style: italic;">Tout est chimie ! </span>Les minipommes, éditions du Pommier, Paris, 2006.</span><br /></div>REEhttp://www.blogger.com/profile/14040627823711364864noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3677126129196209390.post-75563453534969587602008-12-20T08:57:00.000-08:002009-01-30T07:35:30.536-08:00Naturel "et" chimique ?<div style="text-align: justify;"><a href="http://lumiere.ens.fr/traces/2008/09/chimique-comment-des-diffrentes-faons.html">Dans notre billet du 30 septembre 2008</a>, nous proposions de distinguer différentes « manières d’être chimique » et annoncions que cette clarification nous permettrait de dépasser les difficultés liées aux ambigüités du terme « chimique », elles-mêmes évoquées dans les <a href="http://lumiere.ens.fr/traces/2008/06/tout-est-chimique.html">billets précédents</a>.<br /></div><div style="text-align: justify;"><br />Qu’en est-il exactement et dans quelle mesure ces promesses peuvent-elles être tenues ? L’analyse d’un petit livre édité en 2006 par les éditions du <span style="font-style: italic;">Pommier </span>en collaboration avec le CEA, <span style="font-style: italic;">Tout est chimie !</span> (Joussot-Dubien, C. Rabbe, C. <span style="font-style: italic;">Les minipommes</span>) va nous aider à le préciser. Car il contient, selon nous, autant de bonnes idées (figures) que d’exemples de ces <a href="http://lumiere.ens.fr/traces/2008/03/ce-qui-est-chimique-pour-les-uns_25.html">formulations équivoques</a> qu’au fil de nos chroniques nous nous attachons à dénoncer.<br /><br />Revenons donc à l’expression « Tout est chimique » et à ses variantes, telles que le titre de cet opuscule ou cette phrase que l’on trouve à la page 22 : « <span style="font-style: italic;">Tout n’est-il pas produit chimique ? […] Quand on parle de « produits chimiques », on désigne toutes les molécules qui sont dans les gaz, les liquides ou la matière solide qui nous entourent. </span>».<br /><br /><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/Couverture-704544.jpg"><img style="margin: 0pt 10px 10px 0pt; float: left; cursor: pointer; width: 143px; height: 200px;" src="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/Couverture-704266.jpg" alt="" border="0" /></a>« <span style="font-style: italic;">Les produits naturels sont donc chimiques</span> » ajouteraient très certainement les auteurs, à l’instar de nombre de nos collègues. Qu’entendraient-ils par là ? Simplement, et ils n’auraient pas tort, que les produits de la nature sont composés de molécules, pour la plupart identifiées par les chimistes ; que l’ensemble de ces produits appartient donc aux champs de conceptualisation et d’étude de la chimie (les deuxième et troisième niveaux d’appartenance que nous identifiions le mois dernier) ; et qu’à ce titre, on peut les qualifier de « chimiques ». Preuve en est que dans la phrase citée en exergue, le « produit chimique » est défini par la notion de « molécule », c’est-à-dire de manière conceptuelle [i].<br /><br /><br />Mais comment le non-chimiste perçoit-il, lui, le « produit chimique » ?<br /><br /><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/Framboise-711398.jpg"><img style="margin: 0pt 0pt 10px 10px; float: right; cursor: pointer; width: 200px; height: 191px;" src="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/Framboise-711245.jpg" alt="" border="0" /></a>Nous l’avons précisé dans le <a href="http://lumiere.ens.fr/traces/2008/01/parfait-petit-chimiste-recherche.html">billet du 31 janvier 2008</a> : comme une substance à la fois « synthétique et réactive ». C’est-à-dire qu’il considère l’adjectif « chimique », parce que c’est ainsi qu’on lui a appris à le faire à l’école, dans le premier sens de notre classification ; et non pas dans le deuxième ou le troisième. Terrible hiatus alors, entre l’auteur du message et son interlocuteur… Et incompréhension de ce dernier, doublée d’une sourde inquiétude, à l’idée qu’il puisse être entouré de « produits chimiques ». Or de cette inquiétude à la défiance, il n’y a qu’un pas. Et voilà que la plus belle entreprise de communication de la chimie risque de se retourner contre les objectifs de son auteur, s’il n’a pas su prendre conscience de ce décalage.<br /><br /><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/Yaourt-711673.jpg"><img style="margin: 0pt 0pt 10px 10px; float: right; cursor: pointer; width: 200px; height: 135px;" src="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/Yaourt-711527.jpg" alt="" border="0" /></a>Que faire ? Commencer par réaliser qu’il est moins risqué, en vertu de la prégnance des valeurs naturalistes que nous évoquions dans le <a href="http://lumiere.ens.fr/traces/2008/04/des-valeurs-naturalistes.html">billet du 28 avril 2008</a>, d’expliquer en quoi la chimie procure une compréhension de la nature plutôt que de se l’approprier en la qualifiant de chimique. Ce qui amènera par exemple à remplacer l’expression « <span style="font-style: italic;">Tout est chimique</span> » par « <span style="font-style: italic;">La chimie permet de comprendre la structure et les transformations de la matière, qu’elle soit synthétique ou naturelle</span> ».<br /><br />Alors, l’impérialiste expression de « produit chimique naturel » cèdera la place à celle de « substance naturelle », en levant l’ambigüité du terme « chimique » et sans rien perdre du message, le concept de « substance » véhiculant implicitement l’idée que l’objet dont il est question est à la fois identifié et compris par la chimie.<br /><br />D’autres prescriptions pourront sans peine être tirées de cette grille d’analyse. En attendant le prochain billet, également inspiré de ce petit livre, le lecteur saura-t-il par exemple prévoir ce qui pourra être dit de la notion de « pollution chimique » ?<br />________________________<br /><br /><span style="font-size:85%;">[i] Notons tout de même que, compte tenu de l’incommensurabilité de ces niveaux de description, la formulation est en outre un peu maladroite du point de vue pédagogique.</span></div>REEhttp://www.blogger.com/profile/14040627823711364864noreply@blogger.com1tag:blogger.com,1999:blog-3677126129196209390.post-88777675630739214942008-11-24T01:40:00.000-08:002008-12-12T02:26:06.784-08:00Comment je suis devenu chimiste<div style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Dans le billet intitulé </span><span style="font-size:100%;"><a style="font-style: italic;" href="http://lumiere.ens.fr/traces/2008/05/les-vertus-du-tmoignage.html">Les vertus du témoignage</a></span><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >, nous évoquions la mise en scène du <span style="font-style: italic;">Système Périodique</span> de Primo Levi, par <span style="font-style: italic;">Les Atomes Crochus </span>et <span style="font-style: italic;">Les Attracteurs Etranges</span>. Nous insistions alors sur l'extraordinaire potentiel pédagogique et incitatif de ce qu'il est permis de considérer comme l'un des plus beaux témoignages sur la chimie </span><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >du XXe siècle</span><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >.</span><br /></div><p class="MsoNormal" style="margin-bottom: 6pt; text-align: justify;"><span style="font-size:100%;"><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/cjsdc_big.jpg"><img style="margin: 0pt 0pt 10px 10px; float: right; cursor: pointer; width: 150px; height: 267px;" src="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/cjsdc-739451.jpg" alt="" border="0" /></a></span><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Dans un registre plus contemporain, c’est dans ce même esprit que vient de paraître<span style=""> </span>un ouvrage inédit aux éditions <i style="">Le Cavalier Bleu</i>. Intitulé <a target="_blank" href="http://www.lecavalierbleu.com/f/index.php?sp=liv&livre_id=196"><i style="">Comment je suis devenu chimiste</i></a>, il retrace les parcours de vie de 12 personnalités contemporaines de la chimie française [i], sous la forme d’interviews menés et retranscrits par </span><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" ><a target="_blank" href="http://www.lecavalierbleu.com/f/index.php?sp=livAut&auteur_id=198">un chimiste</a> et <a target="_blank" href="http://www.lecavalierbleu.com/f/index.php?sp=livAut&auteur_id=199">un philosophe des sciences</a>.</span></p><p class="MsoNormal" style="margin-bottom: 6pt; text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Ces textes </span><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >abordent tout à tour les circonstances qui ont présidé à la vocation du (ou de la) spécialiste, son cursus et les événements qui l’ont influencé, les personnalités qui l’ont marqué(e), son apport à la chimie et enfin, le regard qu’il (elle) pose sur l’état actuel de cette discipline et de ses perspectives de développement.</span></p><p class="MsoNormal" style="margin-bottom: 6pt; text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Chaque entretien est enrichi d’encadrés, dont l’un est consacré à une œuvre artistique qu’il (elle) considère comme significative au regard de la chimie. Le tout est complété par une introduction analysant la nature et les évolutions du métier de chimiste </span><span style="font-size:100%;"><span style="color:black;">[ii]</span></span><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >.</span><br /></p><div style="text-align: left;"><span style="font-style: italic;font-size:100%;" ><br /></span><div style="text-align: justify;"><span style="font-style: italic;font-size:100%;" >En avant première, </span><span style="font-style: italic;font-size:100%;" >découvrez-en ici </span><span style="font-size:100%;"><a style="font-style: italic;" target="_blank" href="http://www.lecavalierbleu.com/images/30/extrait_196.pdf">[pdf]</a></span><span style="font-style: italic;font-size:100%;" > </span><span style="font-style: italic;font-size:100%;" >l'interview de Jean-Marie Lehn, </span><span style="font-style: italic;font-size:100%;" >l'introduction traitant des évolutions du métier de chimiste, la <a target="_blank" href="http://www.lecavalierbleu.com/f/index.php?sp=liv&livre_id=196">présentation générale de l'ouvrage</a> </span><span style="font-style: italic;font-size:100%;" > sur le site de l'éditeur </span><span style="font-style: italic;font-size:100%;" >et la <a target="_blank" href="http://www.youtube.com/watch?v=tTJdDK-q0_E&eurl=http://www.lecavalierbleu.com/f/index.php?sp=liv&livre_id=196">vidéo</a> de l'interview des auteurs sur </span><span style="font-style: italic;font-size:100%;" >YouTube :<br /></span><br /><div style="text-align: right;"><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" target="_blank" href="http://www.librairie-sciences-humaines.com/boutique/fiche_produit.cfm?ref=ISBN-978-2-84670-220-1&type=9&code_lg=lg_fr&num=0"><img style="margin: 0pt 0pt 10px 10px; float: left; cursor: pointer; width: 320px; height: 240px;" src="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/CJSDC-718916.jpg" alt="" border="0" /></a><iframe allowfullscreen='allowfullscreen' webkitallowfullscreen='webkitallowfullscreen' mozallowfullscreen='mozallowfullscreen' width='320' height='266' src='https://www.blogger.com/video.g?token=AD6v5dwuDpmvC1jNM1umkax9IMCqXm4ZbCUbrLkhS4fLmeDHQ7JVIp4x1VBzLWWwwuL-cSWywCBrCPf570KqCrUitg' class='b-hbp-video b-uploaded' frameborder='0'></iframe><br /></div></div></div> <div style=""> <hr style="height: 3px;" align="left" size="1" width="33%"> <div style="" id="edn1"><div style="text-align: justify;"> </div><div style="text-align: justify;"><span style="font-size:100%;"><a style="" href="http://www.blogger.com/post-create.g?blogID=3677126129196209390#_ednref1" name="_edn1" title=""></a></span><span style="font-size:100%;">[i] Christian Amatore, Jacqueline Belloni, Bernadette Bensaude-Vincent, Yves Chauvin, Olivier Homolle, Jacques Kheliff, Armand Lattes, Jean-Marie Lehn, Jacques Livage, Andrée Marquet, Didier Roux, Hervé This (préface de Bernard Bigot).</span><span style="font-size:100%;"><br />[ii] A lire également : Lestel, L. <i><span style="color:black;">Itinéraires de chimistes : 1857-2007, 150 ans de chimie en France avec les présidents de la SFC<b style="">. </b></span></i><span style="color:black;">Edition </span>EDP Sciences<span style="color:black;"> – 2008.</span></span></div> </div> </div>REEhttp://www.blogger.com/profile/14040627823711364864noreply@blogger.com2tag:blogger.com,1999:blog-3677126129196209390.post-19394309275104651482008-11-10T02:24:00.000-08:002008-11-10T07:40:24.658-08:00Un concours Haïkus - Jardins Chimiques<div style="text-align: justify;"><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/site-785557.jpg"><img style="margin: 0pt 10px 10px 0pt; float: left; cursor: pointer; width: 320px; height: 186px;" src="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/site-785552.jpg" alt="" border="0" /></a>Jusqu’au 28 février 2009, <span style="font-style: italic;">Les Atomes Crochus</span>, en collaboration avec l’<span style="font-style: italic;">Association Française de Haïku</span>, invitent les élèves des collèges et lycées à composer des haïkus pour illustrer les photographies de l’exposition <span style="font-style: italic;">Recréer la vie ? Jardins chimiques et cellules osmotiques</span>.<br /></div><br /><div style="text-align: center;"><span style="font-weight: bold;">Toute la procédure se déroule en ligne, <span style="font-style: italic;">via</span> le site :<br /><a href="http://www.atomes-crochus.org/haikus/">www.atomes-crochus.org/haikus/</a><br /><br /></span></div><div style="text-align: justify;">Les meilleures propositions seront ensuite sélectionnées pour accompagner les légendes scientifiques des photographies et l’exposition, ainsi (re)constituée, sera envoyée aux établissements scolaires des trois premiers gagnants de chaque catégorie. Elle y séjournera une semaine et, grâce au concours d’un chimiste, les jeunes pourront « planter » leur propre jardin chimique. L’occasion pour le lauréat de présenter, lui aussi, l’exposition à ses camarades. Kits de jardins chimiques et appareils photographiques numériques seront également offerts.<br /><br /><span style="font-weight: bold; font-style: italic;">Science en culture</span><br />Susciter le rêve, éveiller la curiosité, changer notre regard sur le monde... La poésie s’impose naturellement dans la démarche des <span style="font-style: italic;">Atomes Crochus</span>. Par le rapprochement entre art et science, elle force à un certain lâcher-prise vis-à-vis des connaissances scientifiques, à jouer avec un code, à mettre la Science en Culture. Tout court.<br />Ancrer la science dans la culture, c’est la rendre peut-être plus attractive, mais surtout plus riche de sens. Par ce projet, <span style="font-style: italic;">Les Atomes Crochus</span> tentent ici de toucher de nouvelles sensibilités, de faire vibrer d’autres cordes, d'explorer d'autres aspects de la chimie…<br /><br /><div style="text-align: center;"><iframe allowfullscreen='allowfullscreen' webkitallowfullscreen='webkitallowfullscreen' mozallowfullscreen='mozallowfullscreen' width='320' height='266' src='https://www.blogger.com/video.g?token=AD6v5dx-_V73aXG3SCyMSgzqmgbNnnGtnIvmh7vUehc9rP807zjpEeSaMXF_LLr82FMjAEo2v7JQ7ZMifyqAVqOOvQ' class='b-hbp-video b-uploaded' frameborder='0'></iframe> <iframe allowfullscreen='allowfullscreen' webkitallowfullscreen='webkitallowfullscreen' mozallowfullscreen='mozallowfullscreen' width='320' height='266' src='https://www.blogger.com/video.g?token=AD6v5dygXHVw8xX2h9k8rdcdzUuAZMQbLEpY_Q98Mvwer0kfkD3u8swVwDc8ySwWF4VvywVCO64vV480UDnHAfpDeA' class='b-hbp-video b-uploaded' frameborder='0'></iframe></div><span style="font-size:85%;">L'exposition <span style="font-style: italic;">Jardins Chimiques</span> sera exposée sur les grilles de la <span style="font-style: italic;">Maison de la Chimie</span>, six semaines durant à partir de la mi-décembre, à l'occasion du colloque <a href="http://www.maisondelachimie.asso.fr/colloques/chimie-et-art">Chimie et Art</a> du 28 janvier 2009. Pour assister à une conférence expérimentale sur le sujet, <a href="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/conference.jpg">suivez le lien</a> ! Photographies : <a href="http://www.stephanequerbes.com/">Stéphane Querbes</a>.<br /></span></div>REEhttp://www.blogger.com/profile/14040627823711364864noreply@blogger.com1tag:blogger.com,1999:blog-3677126129196209390.post-88120403756664185922008-09-30T05:33:00.000-07:002009-01-30T07:16:49.418-08:00Des différentes façons d'être "chimique"<p class="MsoNormal" style="margin-bottom: 6pt; text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >« <span style="font-style: italic;">Mais Papa, c’est ma chaise !</span> » me dit un matin ma fille de 2 ans ½ qui avait l’habitude de prendre son petit déjeuner sur le siège que je venais de choisir. Voulant profiter de l’occasion pour lui enseigner les premiers rudiments philosophiques relatifs à la notion de propriété, je lui répondis : « <span style="font-style: italic;">Oui, lorsque tu y es assise, c’est la tienne ; mais c’est aussi la mienne, car c’est moi qui l’ai achetée. Et on peut même dire que c’est celle du menuisier qui l’a fabriquée. C’est donc la chaise de plusieurs personnes, mais pour des raisons différente…</span> ».</span></p><p class="MsoNormal" style="margin-bottom: 6pt; text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >En m’entendant lui répondre de la sorte, je trouvai soudain la solution à une question qui me résistait depuis des semaines et que nous évoquions dans la chronique du numéro de juin-juillet 2008. « <span style="font-style: italic;">Y aurait-il également plusieurs manières d’être chimique ?</span> ». Car à bien y réfléchir, parce que les chimistes qualifient de « chimique » ce qui <span style="font-style: italic;">relève </span>de la chimie (productions, mais aussi concepts et mécanismes), l’adjectif revêt bien une dimension d’appropriation, instaurant par cet usage une relation d’<span style="font-style: italic;">appartenance</span> à la chimie.</span></p><p class="MsoNormal" style="margin-bottom: 6pt; text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Comme pour la chaise de ma fille, il est alors possible de distinguer plusieurs niveaux caractérisant cette appartenance ; nous en proposons ici trois principaux, chaque nouvelle catégorie élargissant un peu plus l’acception du terme chimique, comme autant de disques concentriques :<br /><br /><o:p></o:p></span></p><div style="text-align: justify;"> </div><p class="MsoNormal" style="margin-bottom: 6pt; text-align: justify;"><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/7.-Tableau-791651.jpg"><img style="margin: 0pt 0pt 10px 10px; float: right; cursor: pointer;" src="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/7.-Tableau-791585.jpg" alt="" border="0" /></a><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >1/ Est <i style="">chimique</i> ce qui est <i style="">produit</i> par la chimie (substances synthétiques, installations industrielles…) ;<o:p></o:p></span></p><div style="text-align: justify;"> </div><p class="MsoNormal" style="margin-bottom: 6pt; text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >2/ Est <i style="">chimique</i> ce qui est <i style="">conceptualisé</i> par la chimie (notions de mole, d’orbitale, nomenclatures...) ;<o:p></o:p></span></p><div style="text-align: justify;"> </div><p class="MsoNormal" style="margin-bottom: 6pt; text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >3/ Est <i style="">chimique</i> ce qui appartient au champ d’étude et d’interprétation de la chimie (pollution, vie…).</span></p><div style="text-align: justify;"> </div><p class="MsoNormal" style="margin-bottom: 6pt; text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" >Selon le cadre dans lequel on le considèrera, un même objet, un même concept, pourra donc être chimique… ou ne pas l’être.</span><br /><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" ><o:p></o:p></span></p><div style="text-align: justify;"><div style="text-align: right;"><span style="line-height: 115%;font-size:85%;" ><span><span style="font-weight: bold;"><br /></span></span></span><div style="text-align: left;"><div style="text-align: justify;"><span style="line-height: 115%;font-size:85%;" ><span><span style="font-weight: bold;">Tableau :</span><span> « Chimique » : trois différents degrés d’appartenance. Ce qui n’est pas chimique dans une catégorie peut l’être dans une autre (l’ozone de la stratosphère n’est pas synthétisé par les chimistes, mais il est conceptualisé par la chimie ; le vin ne peut être défini chimiquement mais la chimie est capable d’en décrire les divers composants, etc.) [i].</span></span></span><br /></div><span style="line-height: 115%;font-size:85%;" ><br /></span></div></div></div><p class="MsoNormal" style="margin-bottom: 6pt; text-align: justify;"><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/7.-Figure-706343.jpg"><img style="margin: 0pt 10px 10px 0pt; float: left; cursor: pointer;" src="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/7.-Figure-706335.jpg" alt="" border="0" /></a>Le même traitement peut être appliqué à chaque discipline, en redéfinissant convenablement à chaque fois les différents degrés d’appartenance. « Mathématique », « physique », « biologique », « chimique »… chaque entrée du tableau ci-dessus peut alors être considérée à l’aune de sa position dans les différents disques concentriques disciplinaires, c’est-à-dire de ses degrés d’appartenance aux mathématiques, à la physique, à la biologie ou à la chimie [ii]. Ainsi, si le corps humain est chimique, il est assurément (et entre autres) également biologique et physique, mais pour des raisons différentes (figure).</p><div style="text-align: justify;"><div style="text-align: right;"> </div><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" ><span style="font-size:85%;"><span style="font-weight: bold;">Figure :</span> L’exemple du cheveu, objet naturel (biologique [iii]) dont on peut étudier la composition (chimique) et qui possède une élasticité</span></span><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" ><span style="font-size:85%;"> (physique)</span></span><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" ><span style="font-size:85%;"> mesurable.</span></span><br /><span style="line-height: 115%;font-size:100%;" ><o:p></o:p></span> </div><br /><div style="text-align: justify;">Savoir s’il est plus l’un ou l’autre a peu de sens et peu d’intérêt ; en revanche, savoir « <span style="font-style: italic;">de quelle façon</span> » il est l’un ou l’autre nous semble absolument fondamental pour la pratique de communication de la science en général, et de la chimie en particulier. Nous verrons ainsi prochainement comment il est possible de lever, par cette distinction, la plupart des ambiguïtés que nous avons relevées dans nos chroniques passées.<br /><br />« <span style="font-style: italic;">Tout est chimique</span> », peut-être… mais <span style="font-style: italic;">comment </span>?<br /></div><br /><div style="text-align: justify;"> </div><div style=""><hr style="height: 3px; margin-left: 0px; margin-right: 0px;font-size:78%;" width="33%"> <div style="text-align: justify;"><span style="font-size:85%;"><span>[i]</span> Ces frontières, qui relèvent de la modélisation que nécessite notre tentative de clarification des sens du mot chimique, sont bien évidemment floues et poreuses. Les cas limites n’en sont d’ailleurs que plus intéressants.<br /><span>[ii]</span> Pour ce qui concerne le « biologique », la définition du disque central est ambiguë car le sens de l’adjectif a récemment évolué. Il peut être employé à la fois pour parler d’un objet « naturel » (c’est le cas de l’expression "agriculture biologique") et, comme pour la chimie, désigner un objet « construit » par la biologie (un organisme transgénique, par exemple). Nous l’emploierons ici au sens de « naturel ».<br /><span>[iii]</span> Remarquons d’ailleurs que les autres disciplines sont souvent moins gourmandes que la nôtre : viendrait-il à l’idée d’un mathématicien de qualifier la Terre de « mathématique » sous prétexte qu’elle est (presque) sphérique ? En revanche, et conformément à notre analyse, on parle de pensée philosophique, d’idée politique, de pratique pédagogique, même lorsque ces pensées, idées et pratiques sont profanes et empiriques, et donc pas consciemment produites par les disciplines académiques correspondantes.<br /></span></div><div style="" id="edn1"><div> </div> </div> </div>REEhttp://www.blogger.com/profile/14040627823711364864noreply@blogger.com1tag:blogger.com,1999:blog-3677126129196209390.post-6200760261315175062008-06-06T06:49:00.000-07:002009-01-30T07:18:41.919-08:00« Tout » est chimique ?<div style="text-align: justify;"><div style="text-align: justify;">Dans deux de nos chroniques précédentes, nous nous amusions à analyser l'usage que se font du mot "chimique" les non chimistes. Mais qu'en est-il des chimistes ? Bien sûr, le chimique, c'est leur rayon ! D'ailleurs, ne cherchez pas et écoutez-les, « tout » est chimique... L'air que vous respirez, le goût de votre café, votre peau, votre organisme tout entier... Tout !<br /></div><br /><div style="text-align: justify;">Tout ? Avant de s'interroger comme il se doit sur cette « évidence », commençons tout de même par remarquer avec le didacticien de la chimie Roger Barlet, que les termes chimie et chimiste ne souffrent pas, dans la perception courante de cette discipline, des mêmes <i>a priori</i> que leur cousin "chimique". Il écrit notamment : « <i>Le terme </i>chimie<i> évoque une science positive, créatrice de produits, omniprésente, utile et réparatrice, qui possède un champ scientifique, une pratique et un langage</i> » et « <i>Le terme </i>chimiste<i> évoque une profession honorable et intéressante</i> » <a name="_ednref1"></a>[i].<br /></div><br /><div style="text-align: justify;">La raison nous en semble relativement simple : les deux premiers termes sont nettement moins ambigus que le troisième. La chimie, bien qu'à la fois science de la nature et industrie, tout autant descriptive de phénomènes naturels que productrice d'objets artificiels, est avant tout une activité humaine bien identifiée : celle qui a trait à l'étude et à l'exploitation de la structure, des propriétés, de la réactivité et des transformations de la matière. Le chimiste quant à lui, est identifié avec encore moins d'ambivalence, tout simplement comme celui qui pratique la chimie, qu'il soit enseignant-chercheur ou industriel.<br /></div><br /><div style="text-align: justify;">Hélas, le mot « chimique » est nettement plus difficile à définir et à cerner dans ses multiples sens... "Chimique" qualifie sans aucun doute les produits et les objets de la chimie, les substances artificielles et les molécules de synthèse ; mais désigne-t-il également ce qu'elle se contente de décrire ? Certes le concept de molécule relève indéniablement de la chimie ; mais la molécule d'eau interstellaire, qui n'a pas attendu les chimistes pour exister, peut-elle sans hésitation être qualifiée de chimique ? Et pourquoi les astrophysiciens qui en décèlent la présence par leurs mesures spectrales ne pourraient-ils eux aussi en revendiquer l'attribution ? Certes les mécanismes cérébraux reposent sur des phénomènes physicochimiques de mieux en mieux identifiés, mais la pensée, la conscience, le langage, que certains considèrent comme les propres de l'homme, peuvent-ils pour autant être qualifiés de "chimiques" ? Et si à chacun de ces niveaux, de natures si différentes, la chimie a des choses à dire, est-il possible qu'il existe également différents degrés, différentes manières "d'être chimique" ?<br /></div><br /><div style="text-align: justify;">Là pourrait bien résider la clé du problème. Car comme tout concept multiforme, l'adjectif "chimique" est sujet à des interprétations maladroites et fallacieuses, au point même d'en devenir flou dans certaines situations. Or les chimistes eux-mêmes pourraient bien porter la responsabilité de sa fatale ambiguïté. <i>Tout est chimique...</i> Vraiment <i>tout</i> ? Réponse dans la chronique du mois d'octobre.<br /></div></div><br /><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/Figure-10-704313.jpg"><img style="margin: 0pt 10px 10px 0pt; float: left; cursor: pointer;" src="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/Figure-10-704288.jpg" alt="" border="0" /></a><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/Figure-4-734528.jpg"><img style="margin: 0pt 0pt 10px 10px; float: right; cursor: pointer;" src="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/Figure-4-734526.jpg" alt="" border="0" /></a><br /><br /><b><br /><br /><br /><br /><br /><br /><br /><br /><br /></b><span style="font-style: italic;">Tout est chimique ?</span><br /><div align="center"><div style="text-align: right;"><span style="font-weight: bold; font-style: italic;"></span><span style="font-style: italic;">Les émanations de méthane issues de l'élevage intensif : une pollution chimique ?</span><br /></div><div style="text-align: justify;">________________________________<br /></div></div><span style="font-size:85%;">[i] Barlet R., <i>L'espace épistémologique et didactique de la chimie</i>, L'Actualité Chimique, n°4, avril 1999.</span>REEhttp://www.blogger.com/profile/14040627823711364864noreply@blogger.com3tag:blogger.com,1999:blog-3677126129196209390.post-18990679749452900782008-04-28T09:48:00.000-07:002009-01-30T07:19:56.269-08:00Des valeurs « naturalistes »<div style="text-align: justify;">A plusieurs reprises dans nos précédentes chroniques, nous avons été amenés à évoquer l'émergence de « valeurs naturalistes » dans notre société. Interpelé par un lecteur attentif du blog « <i>Parlez-vous chimie ?</i><a name="_ednref1"></a> », nous nous proposons d'expliciter ce que nous entendions par là. Un épisode de l'histoire du rapport entre la chimie et la nature va nous y aider.<br /></div><div style="text-align: justify;"><br />Le 5 avril 1894, le chimiste Marcellin Berthelot prononçait une conférence intitulée « <i>En l'an 2000</i> », à l'occasion du discours du banquet de la <a name="_ednref2"></a><i>Chambre Syndicale des Produits Chimiques</i> (Berthelot M. <i>Science et morale</i>, Calmann-Lévy, Paris, p. 512-513, <b>1896</b>)<i> </i>:<br /><br />« <i>[L]a synthèse des graisses et des huiles est réalisée depuis quarante ans, celle des sucres et des hydrates de carbone s'accomplit de nos jours, et la synthèse des corps azotés n'est pas loin de nous. Ainsi le problème des aliments, ne l'oublions pas, est un problème chimique. Le jour où l'énergie sera obtenue économiquement, on ne tardera guère à fabriquer des aliments de toutes pièces, avec le carbone emprunté à l'acide carbonique, avec l'hydrogène pris à l'eau, avec l'azote et l'oxygène tirés de l'atmosphère. Ce que les végétaux ont fait jusqu'à présent, [...] nous l'accomplissons déjà et nous l'accomplirons bien mieux, d'une façon plus étendue et plus parfaite que ne le fait la nature : car telle est la puissance de la synthèse chimique.</i><br /><i>Un jour viendra où chacun emportera pour se nourrir sa petite tablette azotée, sa petite motte de matière grasse, son petit morceau de fécule ou de sucre, son petit flacon d'épices aromatiques, accommodés à son goût personnel ; tout cela fabriqué économiquement et en quantités inépuisables par nos usines ; tout cela indépendant des saisons irrégulières, de la pluie, ou de la sècheresse, de la chaleur qui dessèche les plantes, ou de la gelée qui détruit l'espoir de la fructification ; tout cela enfin exempt de ces microbes pathogènes, origine des épidémies et ennemis de la vie humaine. [...]. L'homme gagnera en douceur et en moralité, parce qu'il cessera de vivre par le carnage et la destruction des créatures vivantes.</i> »<br /><br />Cette vision de l'an 2000 n'est pas sans rappeler l'effroyable description par Barjavel, dans <i>Ravage</i>, de la production d'un énorme bloc de viande synthétique baignant dans un sérum répugnant. Car en effet, qui de nos jours souhaiterait voir se réaliser la prophétie de Berthelot, alors qu'elle est devenue presque réalisable techniquement ?<br /><br /><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/Figure-2-766555.jpg"><img style="margin: 0pt 10px 10px 0pt; float: left; cursor: pointer;" src="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/Figure-2-766520.jpg" alt="" border="0" /></a>Au contraire, pour des raisons trop longues, trop nombreuses à développer ici, et qui feront l'objet de chroniques ultérieures, la tendance actuelle est plutôt aux aliments <i>bio</i><a name="_ednref4"></a>, à la phytothérapie et même... aux <a name="_ednref4"></a>biocarburants (a<a name="_edn4"></a>vec les effets dramatiques que l'on connait sur l'exploitation des surfaces agricoles initialement destinées à l'alimentation). Autant de pratiques fondées sur des valeurs manifestement différentes de celles de Berthelot, « valeur » étant à entendre ici au sens de « <i>ce à quoi l'on tient et ce que l'on désire pour le monde et l'environnement dans lesquels on vit</i> ».<br /></div><span style="font-size:78%;"></span><div style="text-align: justify;"> Certes les chimistes, bien qu'évidemment préoccupés par les questions environnementales, ne sont pour autant pas dupes de ces « croyances » en la prééminence systématique du naturel sur le synthétique. Purifiés, les médicaments de synthèse ne sont-ils pas également mieux contrôlés que leurs analogues phytothérapeutiques ? N'est-il pas illégitime et capricieux de préférer la vanilline naturelle à la vanilline de synthèse, puisque les molécules en sont parfaitement identiques ? Peut-être...<br /><br /><span style="font-size:78%;"><span style="font-weight: bold;">Figure 1 : </span>Les « valeurs naturalistes » s'expriment aussi bien dans le recours aux « produits naturels » que dans la protection de la nature et le bien-être animal.</span><br /><br />Mais le (la) chimiste que vous êtes commencera peut-être à ne plus rester totalement impassible à la lecture de <i>Azote</i>, la 16ème nouvelle du <i>Système Périodique</i><a name="_ednref5"></a> de Primo Levi<a name="_ednref5"></a> (1919-1987). Ici, par exemple (Levi, P. <i>Le Système Périodique</i>, Albin Michel, p. 195-196, <b>1987</b>) : « <i>Que l'alloxanne, destinée à embellir les lèvres des dames, vienne des excréments des poules ou des pythons était une pensée qui ne me tourmentait pas du tout. [...] Loin de me scandaliser, l'idée d'extraire un cosmétique d'un excrément – </i>aurum de stercore<i> – m'amusait et me réchauffait le coeœur comme un retour aux origines, au temps où les alchimistes tiraient le phosphore de l'urine. [...] Le métier de chimiste (fortifié, dans mon cas, par l'expérience d'Auschwitz) apprend à surmonter, et même à ignorer, certaines répugnances qui ne sont nullement nécessaires ni congénitales : la matière est matière, ni noble ni vile, transformable à l'infini, et son origine proche n'a aucune importance.</i> »<br /><br /><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/guerande-761816.jpg"><img style="margin: 0pt 10px 10px 0pt; float: left; cursor: pointer;" src="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/guerande-761813.jpg" alt="" border="0" /></a>Et bien mieux, peut-être même serez-vous obligé-e d'admettre que vous aussi, vous consommez non plus du sucre et du sel bien blancs et bien purifiés, symboles de richesse après la Seconde Guerre Mondiale, mais du sucre roux et du sel de Guérande... parce que sous leur forme brute, ils sont probablement plus proches des besoins de votre organisme.<br /><br /><div style="text-align: center;"><a onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}" href="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/sucre-727961.bmp"><img style="margin: 0pt 10px 10px 0pt; float: left; cursor: pointer;" src="http://lumiere.ens.fr/traces/uploaded_images/sucre-727944.bmp" alt="" border="0" /></a><br /></div></div><br /><span style="font-size:78%;"><span style="font-weight: bold;">Figure 2 : </span></span><span style="font-size:78%;">Sucre roux et sel de Guérande. Inconsciemment considérés comme plus proches des besoins de l'organisme ?<br /><br /><br /><br /></span><br /><div style="text-align: justify;"> <b><i>Le concours lancé dans la précédente chronique est toujours d'actualité. Trouvez des expressions courantes faisant intervenir l'adjectif « chimique » dans un sens non-défavorable, proposez-les en ligne en laissant vos coordonnées et... gagnez !</i></b></div>REEhttp://www.blogger.com/profile/14040627823711364864noreply@blogger.com0